07/08/12
Encore une journée, où sans être vraiment mal, je suis absente, insensible à ce qui m’entoure. J’observe de loin, l’esprit vide. Je fais semblant quand il le faut, le cœur n’y est pas. Je vis dans le fantasme : j’aimerais avoir envie de faire du sport, j’aimerais être mince, avoir envie de bien m’habiller, j’aimerais avoir la joie de vivre. Je me façonne un personnage idéal sans rien faire pour tendre vers lui. Je suis immobile, je laisse défiler les jours.
Je ne fais plus de crises d’angoisse depuis quelques jours, mais elle est toujours là. Elle me rend vulnérable, et creuse un trou qui me donne envie de hurler. J’ai l’impression de me détériorer petit à petit. Je me sens de plus en plus seule avec mon mal être. J’ai enfin compris pourquoi je m’imagine me larder le bras de coups de couteau ou en train de me couper les veines. Ce n’est pas parce que je veux mourir, mais parce que si cela devenait réalité, on serait obligé de voir à quel point je vais mal, on serait obligé de me guérir. J’en suis à espérer faire une dépression; une maladie, ça se soigne.
04/11/12
Je fais une dépression, je suis allée voir une psychiatre. J’ai parlé avec elle de mes idées noires. Le soir même, je prenais une grosse aiguille et j’ai cherché mes veines avec, au niveau de mon poignet. J’ai du piquer plusieurs fois avant d’en trouver une. Lorsque j’ai retiré l’aiguille le sang est monté et s’est déversé sur mon poignet. J’étais fascinée. Le lendemain, dans un moment de vide, j’ai pris une lame de bistouri, j’ai cherché l’artère de mon poignée en sentant mon pouls et j’ai coupé. Quatre fois. Ça n’a pas fait si mal, c’était profond mais je n’avais pas touché l’artère. Quand j’ai réalisé ce que j’avais fait, j’ai appelé mes parents.
05/12/12
Je suis dans une maison de repos psychiatrique. Pour une cure de sommeil de 5 jours, puis pour un temps indéterminé. J’étais folle d’angoisse pendant le trajet. Et à l’arrivée, l’horreur, des gens bizarres partout.
28/12/12
Je me suis faite tatouer Live sur le poignet droit, au départ je voulais le faire sur le gauche mais il y avait trop de cicatrices encore fraiches. Ce tatouage, c’est pour me rappeler que dans les mauvais moments, la vie en vaut quand même la peine et qu’entre en finir et vivre, mieux vaut prendre la seconde option.
30/01/13
Il est 8h et je suis déjà une enveloppe, vide de sentiments et de sensations. Juste une enveloppe avec rien dedans. Tout en moi est mal-être, à vif, comme les coupures que je me fais. Elles cicatrisent, moi non. Je reste avec ma douleur à m’en faire exploser le cœur, qui me pousse à me faire des entailles, toujours un peu plus profondes. La joie de vivre je l’attends, sans plus d’espoir. Je serais seule, sans famille, je pense que je me foutrais en l’air pour en finir pour de bon avec cette blessure à l’air libre que personne ne voit, même quand je ne suis plus enveloppe, même quand je laisse mes larmes couler. Les gens s’inquiètent en voyant mes coupures, mais ce n’est rien ces entailles, par rapport à tout ce sang invisible qui suinte de tous mes pores
06/08/13
Je viens de manger à outrance, je viens de me faire vomir. C’est la deuxième fois aujourd’hui. J’ai l’habitude, j’ai commencé en quatrième, maintenant j’ai 24 ans. C’est venu petit à petit, tracas après tracas. Là, je suis crevée, je me dégoute et je ne comprends pas pourquoi je n’arrive pas à manger normalement.
30/10/13
Ce soir je pleure. j’ai mal au cœur. Mes yeux sont gonflés, je suis fatiguée, vidée. Encore une crise de boulimie, encore ce mal-être cet après midi. Je suis allée au pot de thèse d’une amie. Il y avait des filles en jupe. Des minces, des bien foutues. Et il y avait moi, dans mon vieux pantalon marron, un des seuls qui me va encore. J’ai honte de moi, de ma boulimie, de mon incapacité à respecter mes bonnes résolutions. Il y avait de la nourriture, je lorgnais dessus. Je suis partie avant d’en prendre une miette, puis deux , puis trop. Le cœur lourd. J’ai promené mes deux petits chiens, il faisait noir et froid, j’étais seule et j’ai pleuré encore.
Ce soir je suis une jeune fille de 24 ans, plutôt belle et intelligente, complexée, qui fait une dépression et de la boulimie vomitive et qui n’arrive pas à s’en sortir malgré la psychothérapie et les médicaments. Alors oui, ce soir, je pleure.