Une vie avec mon corps

Depuis aussi loin que je m’en souvienne, il y a deux chose dans ma vie : mon corps et moi.

Ce n’est pas un ennemi, ni un ami, je ne le considère pas, et il semble que lui non plus. Le secret arrangement de ceux qui doivent cohabiter mais qui se savent trahi. Qui a commencé ce cercle vicieux ? Je ne me dérobe pas, je dirais que nous ni sommes ni lui ni moi pour grand chose : la force des chose en somme.

Je suis née sans identité, d’une mère trop jeune qui n’a pas su quoi faire de moi, d’un père absent qui n’avait même pas connaissance de mon existence, et j’ai fini chez un oncle qui lui n’aurait pas trouver à y redir. Je connais bien ma mère maintenant, et je sais que ce qu’elle a fait, ce n’est que par ignorance, or je ne peut pas en vouloir aux ignorants : il patissent de leur propres péchers.

Cet oncle donc. J’avais bien un nom, mais pas de parole, à quelques mois à peine, c’était déjà mon corps qu’il maitrisait, sans avoir voulu faire de moi qui que ce soit. Mon corps, qui passait les premiers mois, les premières années, se mit à me trahir. Ces mains qui passent sur vous et qui vous rebuttent, mais vos reins qui se cambre tout de même avec force, comme un défi contre vous même. Cette haine que l’on ressent face au viol, mais qui n’existe pas réellement face au plaisir lorsque vous ne savez même pas qu’il s’agit d’un viol. Que pour vous c’est la seule marque d’affection qui vous donne une existence. Et ce corps, se traite, qui jouit quand vous voulez pleurer.

Ça finit par passer, les abbominations rejoignent leur frères en enfer (qu’il y reste! Je n’était pas la seule.). On rentre alors dans un socièté différente, le foyer est pour les enfants ce que la colocation forcée seras plus tard pour d’autre. J’avais quoi, six ans, et je ne connaissait pas encore le terme d’intimité. Quel était ce monde ou la sexualité était tabou pour de soit disante raison d’âge ? Je ne percevais pas d’autre marques d’affection, or mon corps en réclamait. Je me déshabiller devant ses petits garçons qui n’avait jamais vu de fille, les inviter à toucher. Puis je me cachait pour pleurer, avec l’impression que cette fois ci, c’était moi qui les avaient violer.

Ma mère reviens dans ma vie, me fait sortir de cet endroit. Quelques années, je connais le bonheur, j’ai beaucoup « d’amoureux », mais je ne me trouve satisfait par aucun, qui eux se contente d’un bisou rapide les lèvres fermées pour croire en l’amour. Pendant ce temps là, mon corps refuse de grandir, mais mon esprit va trop vite pour lui. Je ne prend pas un centimètre, et je perds du poids, je suis maigre à m’en casser les os en saisissant un objet. Pourtant je n’ai pas de problème avec la nourriture, j’ai un appétit démentielle, et à 10 ans j’avale plus de nourriture qu’un adulte à la même table. Et je n’aime pas mon corps. Je fais 1m35, 21kg, j’ai des hanches déjà large pour mon âge, mais qui sont bien trop sayante, je suis déjà obligée de porter des soutiens groge alors que les autres filles n’ont même pas une brassière. A croire que tout ce que j’avale se fourre dans ma poitrinne. Et j’ai un réel problème avec le sexe.

Ce que mon corps ne m’octroie pas, je le fais par autorité. Je suis violente, je n’apprècie pas les gens de mon âges, je ne suis qu’avec des plus grands, à peine dix ans je fume, je bois, je baise. La sainte trinité. Je m’échappe par là, j’ai une répartie suffisante pour que des garçons bien plus âgés finissent par la fermer et s’occuper de moi. Mais je ne retrouve aucun plaisir. J’essaye juste de cacher par là que j’ai vraiment un problème avec le sexe, avec mon corps. Je le maltraite, je me frappe, je me brûle, je me griffe au sang, mais toujours à des endroits que les gens extérieur ne voient pas : le dos, le haut du ventre, l’intérieur des cuisses. Mon corps me fait mal à force de ne pas ressentir de plaisir, et au bout de trois mois, je me mets à vomir de faççon innexpliquer, ma mère me fait passer des test, le verdict tombe. Mon corps se rebiffe, je suis diabétique insulino dépendante. Le salaud. Mais les premiers temps du traitement, je reprend du poids, mais je ne grandit toujours pas. Je me cache au mieux pour commettre mes méfaits, une bouteil par ici, une clope par là. Ma mère travail et n’ai jamais là, ça aide. Et puis arrive mon beau père.

De suite, je ne l’aime pas, et lui non plus. Dans la rue, mon physique et ma réputation me permette à onze ans d’attirer les regards, mais lui m’ignore magnifiquement. Alors je me mets à detester le seul coupable qui soit à ma porter. Mon corps. Quelque chose doit clocher. J’ai pris trop de poids sans doute (après coup, 30kg pour 1m 42 ne me semble pas tant que ça!). Alors j’arrète de me soigner. Sa marche magnifiquement bien, je perd 10kg en 2 mois. Mais je perds aussi la raison. Les hyperglycémie me rendent folles et je me remets à me mutiler : la nuit, je me bande les membre jusqu’à ce que le sang ne circule plus, j’attend un bon moment, puis je relache la pression d’un coup, la douleur suffit à me faire gémir. J’ai alors un déclic, je ne ressent plus de plaisir par le sexe, je le ressentirait par la douleur. Je m’enfonce des aiguilles un peu partout, je m’oblige à rester dans les positions les plus inconfortables jusqu’à ce que des bleus se forment, je me frappe, je me gifle, je m’arrache les cheveux et la peau. Mais je reste raisonnable, car mon corps reste la seule chose qui me permet de me faire remarquer. Du moins je le croyais.

Mon beau père continue de m’ignorer, et après 2 mois sans me soigner correctement et à m’infliger des traitement sado-masochiste, je tombe dans le coma. Je deteste encore plus mon corps à mon reveil, qui m’a trahi sans me laisser aller jusqu’au bout. J’ai des sequelles, mes reins fonctionnent bizarrement, je suis complétement dessécher, j’ai le foi stéatosé, et surtout, on s’inquiète de ma fertilité. Si il y a bien une chose que je ne veut pas, c’est être priver du choix d’avoir un enfant.

Je retourne au collège, décider à m’assagir, mais ma mère est tomber enceinte entre deux. On a de gros problème d’argent, et ça me préoccupe presque plus qu’elle. Ma sœur née, l’accouchement se passe mal et il découvre à ma mère des problème cardiaques dont il faut urgemment s’occuper. J’ai douze ans, mon beau père est absent, je devient maman par la force des chose. Ma sœur ne me quitte plus, je l’mmène au collège avec moi. J’habite une banlieu difficile, ils comprennent la situation, et les surveillant font les baby sitter pendant les heures de cours, ça tiens les élèves plus calmes, elle est tellement mignone que personne ne veut l’abimer. Mon corps finit par ressentir le poids d’un enfants, non sur le physique, mais la fatigue, la pression, la résponsabilité me laisse des traces. Je suis pâle comme une morte, je maigris encore, j’ai des cernes jusqu’en bas du visage, les yeux rouges, mal au dos de tout le temps la porter… Mais au moins je ne me fait plus souffrir pour rien. Maintenant qu’elle est là, je ne recommencerait plus, je prends conscience que des choses bien plus importante mérite mon attention. Mais ma mère sort de l’hopitale, ma sœur n’est plus à moi. C’est premiers mots, c’est à moi qu’elle dit, et c’est « maman ». alors comme une mère je décide de sacrifier ce que j’ai, et je n’en ai qu’une. Ma sœur n’a plus besoin de mes bras pour la porter, alors à treize ans je me prostitue pour lui offrir les cadeaux que nos problèmes d’argent ne lui permette pas d’avoir. Je redécouvre le sexe, cette chose qui dissocie tant mon corps et mon esprit, car je découvre que si je ferme les yeux, peu importe qui il y a en face, mon corps à les mécanismes suffisants pour réagir instinctivement. Je m’endors pendant mes rapports sans que ses hommes ne s’en aperçoivent. Et puis un jour, je tombe de douleur, une douleur au bas ventre insoutenable. Le diagnostique tombe, j’ai un cancer. Minime, un cancer de l’appendice. Mais quand même… entre mon corps et moi, les coups, c’est chacun son tour.

Sortie de là, je décide de me reprendre en main, mais je rechute de temps en temps. J’ai pris vingt centimètre en 2 mois après l’opèration. Je n’ai jamais dépasser les 50 kg pour 1m70, mais c’est encore trop, il faut que je rende les coups après ce qu’il m’a fait ! Alors je boit, je boit, je boit encore, et à quinze ans je me retrouve complétement alcoolique. Je rencontre quelqu’un, on flirt, on sort ensemble, on couche ensemble, et finnalement on s’aime. Alcoolique lui aussi. Sa me fait prendre conscience, j’ai peur de ce que je suis devenue, de ce que je fais subir, non plus juste à mon corps, mais à moi même ! Alors je part, j’emménage chez mon père, retrouver quelques années avant, à 800km de là où j’ai grandit. Je pense pouvoir repartir à zéro, mais mon corps me trahi encore. Le sevrage est compliquer, mon corps tremble tout seul, il voit des chose qui n’existe pas, se sent en danger. Alors je retombe dans le piège. Je couche pour une bouteille de rhum, une barrette de shit. Sa dure plusieurs semaines, mais je prends peur. Sa fait quinze ans que mon corps est maltraité, abusée, tromper, trahi, frapper, humilier. Ma sœur loin, je me rend compte à quel point ce désir d’enfant me dévore. Et je rencontre un homme, l’homme qui changea, et continue de changer ma vie. J’ai tout quitter, études, famille, domicile, et j’ai emmenager avec lui. J’ai arréter de maltraité mon corps. Je suis tomber enceinte à 17 ans, mais j’ai fait une fausse couche. J’ai compris le message. Mon corps me disait « écoute, ça peut se négocier, si tu reste bien avec moi, je ne t’embéterait plus, mais je te rend le dernier coups, pour la forme ». C’était le coup de trop. Une grosse dépression, je quitte mon ami. Je fréquente d’autre type et je prend peur : mon corps continue à prendre des décision seul ! Je couche avec ses hommes en dormant, sans m’en rendre compte, à mon inssue et pourtant de mon fait à leur dire. Je les crois. Mais j’ai peur, car je ne maitrise pas. Je ne veut pas tomber enceinte d’un inconnue, ou chopper une saleté à cause d’une nymphomanie sommanbulique. Je n’ose pas consulter, car j’ai honte. Et je retrouve cet homme qui à tout changer. Lui, pendant mon sommeil, il ne me fait pas l’amour. Il me fait parler, il me fait expliquer pourquoi je fais ça.

Apparement, mon corps à beaucoup de chose à dire, il lui manquait juste de l’écoute. Maintenant, je m’aime, j’aime mon corps, je suis devenue quelqu’un, et non plus juste quelque chose. Et j’ai un ami merveilleux qui accepte de sacrifier son sommeil à cette thérapie nocturne encore aujourd’hui.

Zeeva.

Réconciliation

Je n’ai jamais fait l’amour avant de faire l’amour avec mon mari. Pourtant j’avais eu d’autres amoureux et j’avais largement dépassé « l’âge moyen » de la « première fois ». Je fuyais.

Je ne voulais pas montrer mon sexe. Chaque visite chez le gynécologue était une torture psychologique et physique. Je ne portais pas de pantalon trop serré ni de jupe au-dessus du genou, j’avais trop peur de laisser voir ou deviner quelque chose de mon sexe. J’étais malade à l’idée d’aller en cours de sport ou de natation, je me faisais dispenser pour des raisons fictives. Avoir mes règles était la pire des choses et il était hors de question que je mette un tampon. Je ne supportais pas non plus de voir mon sexe, de l’apercevoir. D’ailleurs, je n’y ai jamais touché avant que mon mari ne m’apprenne à le faire.

Pourtant, ça n’a jamais été un tabou dans ma famille. Mais mon sexe était devenu mon pire ennemi, il était sale, il me salissait. Mon corps s’était totalement fermé un jour, brutalement, dans la violence.

Quand j’ai fait l’amour avec mon mari pour la première fois, j’ai compris que je l’aimais comme aucun autre homme. Qu’il me respectait comme aucun autre homme. Qu’il était digne de mon amour, de ma confiance. J’ai découvert le plaisir de l’amour charnel. J’ai compris qu’il était l’homme de ma vie. Et que j’avais gagné.

J’ai gagné contre celui qui m’a violée.

Mal recousue

Mai 2009, naissance de ma princesse. Un peu vite, un peu rapide, mais elle est en pleine forme, c’est le principal. Mon corps a pas mal souffert de ce « boulet de canon » – selon les termes médicaux-, pas mal de déchirures internes et externes, double épisio, révision utérine et début d’hémorragie…

 

Je sors de la maternité je suis fatiguée et j’ai mal, mais c’est normal je suis devenue maman, mon corps a besoin de temps pour s’en remettre.

 

Retour à la maison, difficile de s’asseoir, difficile de se lever, mais peu à peu tout se met en place, le rythme se prend. Au bout de quelques semaines tout va mieux. Je suis reposée, je découvre ma fille, je découvre un merveilleux père en mon mari, la vraie vie reprend, l’envie de câlins revient doucement…

 

Ca y est, mes douleurs ont disparu, mes nuits ne sont plus chaotiques, l’envie de câlin est de plus en plus forte… je suis prête ! Oh oui j’ai quelques appréhensions, mais j’ai envie de me retrouver en tant que femme, de retrouver mon mari.

 

Premier essai, un peu cata… trop de craintes ? trop pressée ? trop perdue ? Je ne sais pas mais je n’y arrive pas, j’ai trop mal. Je me rassure, c’est normal il va me falloir un peu de temps, l’accouchement n’a pas été simple, je dois avoir peur.

 

Le temps passe, et rien ne s’améliore… j’ai mal, très mal et je ne me comprends plus. Je pleure en silence avant, pendant et après les rapports. Je m’en veux, je suis triste, je ne suis plus une vraie femme…

 

Plusieurs mois plus tard, je me décide à en parler à ma gynécologue. Ce n’est plus possible, il doit y avoir un problème, ça ne peut pas être que dans ma tête ! Elle ne voit rien, mais me croit et m’envoie voir une grande spécialiste. Deux mois d’attente, mais deux mois d’espoir! Le rendez-vous arrive, le médecin m’examine longtemps et me pose de nombreuses questions. Après une demie-heure, le verdict tombe, je n’ai aucun problème physique, le problème est dans ma tête. Je refuse d’être une femme, je ne veux être « qu’une maman », je n’aime plus mon mari comme il faut. Le médecin me propose même à demi-mot de prendre un amant, pour « mon bien ».

 

Je ressors de ce rendez-vous triste, abasourdie, malheureuse, perdue et avec une ordonnance d’anti-dépresseurs.

 

Je ne sais plus quoi penser, mais je sais que j’aime mon mari et que je ne veux pas prendre ces médicaments…

 

Le temps passe, les câlins se font rares les douleurs sont toujours là, mais j’aime de plus en plus mon mari patient et compréhensif qui est lui aussi un peu désoeuvré. Je pensais pouvoir accepter mon état, vivre comme ça. J’ai une jolie famille, une chouette vie, un métier que j’aime, pas de soucis de santé ni d’argent, je peux bien vivre avec ce petit problème non?

 

Et bien non, un jour je craque, j’explose, je pleure sans m’arrêter… je ne suis plus moi même, je ne suis plus entière et je ne peux pas vivre comme ça. Ma fille a deux ans, je dois comprendre ce qui m’arrive !

 

Retour à la case gynéco, nouveau rendez-vous avec un spécialiste, encore 1 mois d’attente… J’ai beaucoup moins d’espoir que la première fois, mais je suis mal, il faut que j’agisse. Début du rendez-vous, je suis un peu stressée, je raconte encore une fois toute mon histoire depuis l’accouchement. Le chirurgien m’examine 3 minutes et me dit c’est bon vous pouvez-vous rhabiller. Je suis déçue, j’ai bien l’impression que tout ça n’a servi à rien. Je m’assois au bureau du médecin, et là elle me sort un papier et commence à me faire un petit schéma. Quelques petits traits de crayon pour m’expliquer qu’il y a deux ans, mon épisio a été très mal recousue: ils ont recousu à l’entrée mon vagin un « auvent muqueux » (un morceau de peau) de plusieurs centimètres. Je regarde cette femme, je la remercie sincèrement, et je me mets à pleurer en silence. C’est incontrôlable, je suis soulagée. J’aime mon mari, j’accepte mon rôle de femme, je ne suis pas « qu’une maman », mon problème est bien physique !

 

Je suis opérée 15 jours plus tard, j’ai un peu mal à cause des points mais quel bonheur cette douleur ! Je ne suis pas anormale, je vais retrouver mon mari, je vais revivre…

 

Aujourd’hui je revis, je suis plus que jamais heureuse d’être mariée avec cet homme merveilleux et ma princesse a un petit frère de 3 mois qui a été conçu dans la douceur et l’amour et non dans les pleurs et la douleur.

 

Mon sexe

Dans la galerie des curiosités, il n’y a pas encore eu le sexe difforme, et je me permets donc d’ouvrir la catégorie autour d’une partie du corps qui m’a tant fait souffrir, et puis maintenant, c’est moi, ma vie intime, connue de mon homme seulement, de mes gynécos officiellement aussi.

Donc j’ai eu un sexe « normal », enfin ce qu’on imagine par un sexe féminin, tout un temps.

Quand j’étais petite fille, un soir, on a abusé de moi sexuellement en justifiant cette violence par la phrase: Faut que tu t’habitues, plus tard, les hommes te feront ça.

Puis je suis allée me coucher, j’ai refoulé ce que je venais de vivre et je l’ai oublié.

Puis j’ai eu mes règles, à 11 ou 12 ans, et c’était la honte, parce que dans ma famille, on ne parlait pas de ça, et que nulle part j’avais quelqu’un pour en parler, il n’y avait pour m’aider que les pubs de tampons à la télé. Puis j’ai eu 13 ans. Et je me suis réveillée un matin, et mon sexe avait changé.

Les lèvres inférieures de la vulve était devenues du jour au lendemain énormes, elles dépassaient les lèvres extérieures de plusieurs centimètres. J’aurais du mal à dire ce que ça a bouleversé en moi. Je ne savais rien sur le sexe féminin. Personne n’en parlait avec moi. J’étais enfermée dans mon ignorance, comme un bébé complètement à la merci de ce qui lui arrive. J’étais paniquée et je crois que ça m’a détruit.

J’achetais à l’époque des magasines féminins parce que j’aimais les pubs de luxe et je me souviens que, sur une double page, il y avait une pub pour le couturier Louis Féraud, avec une femme qui portait une veste de cuir. Et le slogan, imprimé en grand, c’était: VOUS ÊTES UNE FEMME!

Moi, qui ne savais pas ce qui m’arrivait, je ne me sentais plus visée par ce slogan. J’étais, à 13 ans, persuadée d’être hermaphrodite. PERSUADÉE. C’était ma vérité! Je me souviens avoir lu des reportages sur les hermaphrodites, et je me disais: je suis ça.

À 15 ans, aussi du jour au lendemain, je me suis souvenue d’avoir été abusée. Je me suis rappelée de tous les détails. Et j’ai commencé à éprouver une énorme haine et rancune vis-à-vis de la personne qui m’avait tant abimée.

À 17 ans, j’ai craqué. Je n’en pouvais plus de ne pas pouvoir avoir de vie sexuelle comme mes copines parce que j’avais ce bout de peau en plus. Je voulais savoir, enfin savoir. J’ai pris mon courage à deux mains, et j’ai dit à ma mère que je devais aller voir un gynécologue. C’était la première fois que j’allais me retrouver sur la chaise à étriers, et je savais que j’allais exposer quelque chose d’horrible.

Le gynécologue – un type dont j’espère parvenir un jour à effacer le souvenir – m’a dit, et cela a eu l’effet d’une bombe, 1) que c’était une malformation fréquente et rien de grave, 2) que dans mon cas, c’était quand même impressionnant, 3) qu’avec une petite chirurgie plastique, quand je serai adulte, on allait réparer ça, 4) il m’a demandé si je me masturbais.

Savoir que j’étais une femme, une vraie femme, a provoqué en moi, à 17 ans, le besoin impérieux de rattraper ce que je pensais avoir raté, la baise. Je me suis mise à baiser avec n’importe qui, hommes et femme. Je me proposais sur le net, que j’étais en train de découvrir, et des hommes, venus parfois de loin, me baisaient, dans des chambres d’hôtels, des escaliers d’université, sur des bancs, dans des voitures, dans les toilettes du cinéma. Plus âgés que moi, mariés, je m’en foutais. Je suis allée loin.

Et un jour, je ne savais plus quoi faire. Alors je suis partie pour ne pas devoir solutionner tous les problèmes que je m’étais attirée. J’ai quitté le pays, je suis partie très loin, et je me suis investie à fond dans mes études. C’était mes années de sacerdoce. Je me levais à 5 h, j’étudiais, j’allais à la fac, je rentrais, j’étudiais jusqu’à 22 h, tous les jours, weekend compris. Pas de copains, pas de sorties, pas de débauche. J’ai arrêté de prendre la pilule, puisqu’elle n’était plus nécessaire. Mes règles ne sont pas revenues. Après 1 an et demi sans règles, j’ai pris des hormones pour quand même relancer la machine.

À la fin de mes études, un soir, j’ai croisé le regard d’un jeune garçon. J’ai su que je voulais l’avoir. Je l’ai dragué. On est devenu un couple après une demi-année. On s’est fiancé, on s’est marié. On a eu un enfant qu’on a perdu. On a eu un enfant qui est notre bonheur.

 

Je blâme ceux qui ont abusé de moi, famille et médecins. Je blâme ceux qui ne m’ont pas éduquée et qui m’ont laissée souffrir dans mon ignorance. Aujourd’hui, je commence lentement à être par-delà la haine et la colère.

Mes pointillés

 

Mes cicatrices et moi, c’est une grande et longue histoire d’amour. (Faut dire que ça a commencé tôt).

La première fois, j’avais 1 an et demi, sur la lèvre du haut de ma bouche : bing-la-tête-la-première-sur-le-levier-de-vitesse ( ???), et bam-1-point-de-suture. Celle-là, je ne m’en souviens évidemment pas, elle s’est tout de suite faite fine, en plus. Elle ressemble un peu à un signe de ponctuation (un trait avec un point de chaque côté, en symétrie ; hum, pas clair..). Ce qui a été pratique, c’est qu’elle a longtemps été un signe de distinction avec ma sœur jumelle. Je l’ai appelée Géraldine, comme ma maîtresse de petite section. 10 ans après, presque jour pour jour, j’ai remis ça : bing-la-tête-contre-le-volant-des-auto-tamponneuses-crac-je-me-mord, et bam-5-points-de-suture. Là, je m’en rappelle, je saignais, je saignais, je n’arrêtais pas de saigner. Une fois les fils enlevés, elle s’est « mise une boule », ma cicatrice. Beaucoup plus visible, sur ma lèvre du bas. Ma mère m’a consolée en me disant que plus tard, je pourrais la cacher avec du rouge à lèvres (elle qui ne se maquille jamais, tu parles si ça m’a parlé !…). Que nenni, ma cicatrice, elle se voit encore plus avec du rouge dessus. Bon, tanpis. Deuxième signe distinctif. Je l’ai appelée Angéline (qui était le deuxième prénom d’une de mes arrières grand-mères, je crois). Très vite, je me pose LA question qui tue : et si ça m’empêchait d’embrasser de façon agréable ?… Alors pour mon premier baiser, j’ai demandé à mon premier amoureux si ma bouche toute recousue le dérangeait. Ouf que non.

Puis il y a eu l’appendicite (un 24 décembre, à la montagne, hum-hum). Assez moche aussi, celle-là, mais pas trop visible. Ou en tout cas, facile à camoufler. Je l’ai appelée Maryline (je n’avais pas beaucoup d’idée de prénom en -ine). Six mois plus tard, mon intestin a fait un nœud, une occlusion intestinale ça s’appelle, j’ai le droit à une cicatrice verticale, sous le nombril. Le doute n’est plus permis, j’ai vraiment compris que je ne cicatrisais pas bien du tout du tout. Ça me fait une vallée au milieu du ventre, c’est pas joli, presque complexant, alors je l’appelle Eglantine (j’aimais beaucoup ce prénom, c’est thérapeutique). Elle a une tête de ver de terre. Un ver de terre qui semble me grignoter le nombril.

C’est au tour d’un gros grain de beauté que je dois enlever « au cas où », en plein milieu du dos. Que même le dermato s’excuse de m’avoir fait une aussi vilaine cicatrice. Celle-ci est restée anonyme, puisque je ne la vois jamais. Elle ressemble beaucoup à Eglantine, un autre genre de ver de terre, mais de l’autre côté de mon ventre. Ce médecin m’explique quand-même que j’ai la peau très (trop) élastique, ce qui justifie ces cicatrices devenues difformes, qui se sont trop écartées.

Ma cinquième cicatrice, c’est mon épisio (j’aurais peut-être dû la prendre en photo ?…), et là, alleluia ! La sage-femme me dit chaque jour à la maternité « qu’est-ce que vous cicatrisez bien !… ». Ah. C’est sûr que c’est une chance. Je suis super contente de bien cicatriser de là, hein. L’avantage d’avoir beaucoup d’élastine dans la peau, c’est que mes tatouages, ils sont passés impecc. Pas de croûte, dès le lendemain, c’était nickel. (J’aurais pu me faire tatouer une paire de ciseaux qui fait mine de découper, tiens).

 

Moi, on peut me découper selon les pointillés, si on veut. Et ça me plaît bien, au final. Y’en a pas deux comme moi, du coup ! A suivre ?…

La cicatrice

J’ai triché, car cette cicatrice n’est pas celle de la photo.
Cette cicatrice, si elle n’est plus sur mon corps, est toujours dans ma
tête.
Au plus intime de moi même, témoin douloureux de la naissance de ma fille.
Si banale.
Mais un an après, toujours béante pour mon esprit.
Une naissance presque idéale. Mais la peur. Peur de ne pas y arriver.
Peur que, comme pour l’aîné, l’obstétricien soit appelé en renfort. Peur
de me déchirer. Peur d’être à nouveau mère ? La sage-femme sent que je
me retiens, me propose de « m’aider ». Je sais ce qu’elle va faire, je lui
dis que j’accepte qu’elle me coupe. Une fois incisé, je pousse sans
crainte. Ma fille naît, je vais l’accueillir avec joie.
Une cicatrisation douloureuse. Le feu, durant une semaine. La vision de
ma chair à vif, torture. Les larmes. Mutilée, je suis mutilée. Pourtant,
une belle cicatrisation, d’après ma sage-femme.
Aujourd’hui, plus aucune trace de cette cicatrice. Mais dans mon esprit, si.
Moi aussi j’éteins les lumières avant tout rapport avec mon chéri. La
peur d’avoir mal, l’absence de plaisir. Un an après.
Je l’évite même.
Doit-on renoncer à être femme lorsque l’on devient mère ? Non, mais on
doit cicatriser. Et accepter que jamais rien ne sera comme avant.

Anonyme