Juste mon ventre

C’est comme ça, à chaque fois qu’une photo de ventre « abîmé » par la grossesse est publiée sur un blog, forum, etc, elle est suivie de commentaires toujours identiques.
Et pour une même photo, chacune voit midi à sa porte …
D’un côté les « ah ouais quand même / waouuuuh la pauvre » compatissants, mais rudes pour celle qui complexe …
De l’autre les « petite joueuse c’est pire chez moi / elle a de la chance y’a pas trop de dégâts », partagés entre auto-dérision et besoin d’attraper un peu de compassion, de se sentir moins seule dans son mal-être …
Et souvent je me demande, pourquoi ce besoin de créer cette pseudo hiérarchie de celle qui aura le pire ventre ou celle qui aura retrouvé le physique de ses 15 ans ?
A partir de combien de vergetures c’est légitime de se plaindre sans passer pour la superficielle de service ?
Et quand on est dans la catégorie « ouch aïe ouille » et qu’on s’en fiche, on est une meilleure maman alors ?

Moi je ne sais pas trop … mon ventre, c’est juste MON ventre. Quand il m’est arrivé de le montrer au détour d’une conversation, on m’a parfois dit qu’à partir de 3 enfants je peux demander une prise en charge pour le faire retendre … mais non c’est mon ventre! J’ai aimé le voir s’arrondir 3 fois, couver mes ptits trésors, sentir et voir mes bébés communiquer à travers lui.
Alors je peux faire l’inventaire des dégâts : peau distendue, en « trop », qui je le sais ne regagnera jamais en fermeté, nombril planqué là-dessous (mais qui sort de sa cachette quand je suis enceinte), et tellement de vergetures (bien larges tant qu’à faire) qu’il faut plutôt chercher là où y’en a pas!

Et après ? Oui, mes grossesses ont déformé transformé mon ventre. Non, ça n’a pas changé ma vie.
Ce qui a changé ma vie, ce sont mes enfants.
En écrivant ce texte je réalise que ces traces extérieures ont gommé les traces intérieures, les complexes, les blessures accumulées de l’adolescente renfermée qui manque de confiance en soi. Mon ventre représente le moment où je suis devenue mère, ça m’a changée dans le sens où j’ai appris à laisser aller, voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide. Ce qui aurait pu me complexer avant, est finalement devenu bien quelconque.
Je n’aurais pas été contre une peau moins fragile, mais ce qui est fait, est fait ! On me ferait choisir entre le pack vergetures et le pack ventre lisse , je crois que je ne changerais rien.
Parce que mon ventre tel qu’il est, j’y vois du bonheur et de l’amour, les souvenirs de mes grossesses, des instants de ma vie tatoués pour toujours, le premier album photo de mes enfants.

Il y a des soirs ou le passé vous rattrape

Il y a des soirs ou le passé vous rattrape. Ou tous ce qui était bien rangé au fond de votre mémoire refait surface, ou toute une partie de vous ressurgie. Des soirs pires que d autres ou toutes les parties de votre cerveau même celle que vous avez désespérément essayé d enfouir réapparaissent. Il y a des soirs comme ça… Aussi loin que je me souvienne j ai toujours détesté ce corps … J ai toujours détesté ce qui fait de moi ce que je suis. Un homme l a meurtri a l aube de mes 12 ans je n est d ailleurs aucun souvenir avant de ce moi, de celle que j étais ,de celle que j ai bien pu être . Sûrement une jeune fille pleine de vie je ne sais pas, je ne m en rappelle plus. Toujours est il que ce jour la, j ai appris a me détester a me haïr, a lui infligé le pire. Aussi loin que je me souvienne j ai toujours eu une relation très particulière avec la nourriture et les aliments. Effacé ce corps qui avait pu être le mien ce jour la, Effacé la petite fille qui ne pouvais pas hurler sous ses mains. Mon seul but ?. Effacé les traces qu il avait laissé, Nettoyé , lavé, rendre neutre ce corps pas encore formé. Reprendre possession de moi et maîtriser… Avoir la maîtrise de soi, de ce que l on est, de ce qui passe par soi. Je crois que j ai arrêter de manger durant cette période .

J ai arrêté de m alimenter pour m effacé. J ai alors 15 ans et je pèse 38 kg pour 1m76. Je suis seule… mes journées sont rythmé par les crises j invente toujours plus de stratagèmes pour évité les repas, je cache la nourriture, me réfugie dans ma chambre… J ai d ailleurs plus de 10 ans plus tard beaucoup de mal a rester a table. Et ce corps alors ? J ai réussi a jouer avec, a prendre possession de cette chose décharnée. Je l ai mutilée. Je l ai sali, j ai joué et j ai perdu… Je l ai mutilée en essayant de lui donner la mort pour que tout s arrête et que tout disparaisse. Arrêté de penser pour fuir la réalité pour fuir un passé et détruire un avenir. J ai joué en repoussant les limites, mes limites. Je sais que j en était proches que j allais mourir et j ai eu peur. Peur de perdre ce rien qui était moi . Je l ai sali pour qu on m aime pour avoir de l attention pour me sentir vivre et pour m abandonner. Chercher de la douceur la ou il n y en avait pas ,perdre pied dans des bras qui n était pas les miens. J ai perdu et je me suis perdu j ai jouer un rôle la première partie de ma vie. Rebelle et insignifiante Grande gueule et meurtri. Personne n a su voir qui j étais vraiment et pourquoi je me haïssais. Emprisonné dans un corps qui devenait celui d une femme alors que mon esprit était resté celui d une enfant.

J ai connu l hôpital, la réanimation, les traitements. Ceux qui vous abrutisse pour ne plus penser Ceux qui font rentrer les souvenirs dans des cases et qui les empêchent de remonter . Ils sont pourtant toujours la tout près, toutes les nuits, tous les soirs .J ai grandi, le temps a eu raison de mes kilos j ai repris tant bien que mal une alimentation et j ai donné la vie par deux fois …J ai aimé être enceinte je me suis regardé j ai aimé ce ventre rond , j ai porté la vie alors que j étais morte a l aube de mes 12 ans. Plus forte que tout, plus rien ne pouvais me détruire j étais deux. Je suis née le 16 novembre 2007 en donnant la vie. Mon tout petit je l ai nourri au sein sa première année je lui ai donné le meilleur de moi même mon bébé joufflu je le nourrissais de moi . J ai recommencé en 2009 avec sa petite sœur petit bébé surprise la vie me faisait le plus jolie cadeau a défaut d être une femme j étais une mère .

Je crois qu’ On ne m a jamais aimé pour ce que j étais vraiment on n a même jamais vraiment cherché a savoir qui j étais.. J étais la et ça suffisait . Spectatrice de ma propre vie… Le passé vous rattrape toujours il y a des soirs comme ça… Apres huit ans de vie communes de promesses ratés je suis partie. J ai quitté ce qui avait un faux semblant de jolies.J ai quitté le neant, le rien qui me construisais. Je combat mes démons, ils sont toujours la ,je commence juste a amadoué mes peurs. Je ne vis plus contre elles je vis avec. Chaque nouveaux aliments goutés et une victoire et un pied de nez a ma peur d avoir en moi ce que je ne connais pas. Aujourd’hui hui j ai 25 ans, aujourd’hui hui j ai refait ma vie… Aujourd’hui hui je réapprend a aimé ce corps, j ai grossi. Je vis la passion avec un homme celui qui malgré lui me réapprend a m’aimer il sait tout de moi le seul et l unique. Le pire et le meilleur. La douceur et la douleur. J ai mal dans ce corps trop grand pour moi mais je m efforce tout de même a aimer celle que je suis désormais . J ai 25 ans un corps de femme un cœur qui bat, des rondeurs et des complexes . Mais je suis aussi entourée de rires, de cris d enfants de douceur et d amour .Je remercie la vie de l avoir fait entré dans la mienne a pas de loup a force de patience et d amour,de promesses et de vertiges. J ai la tete qui me tourne de tout ce bonheur..J ai peur que tout s arrête, peur de perdre ce que je n ai jamais réussi a atteindre . De lui faire partagé ce bagage trop lourd a porter, me soulager de cette peine que je porte seule depuis 15 ans. Il m apaise me console et je me noie dans ses yeux. Il est le sens de ma vie… Aimer a en mourir ? Oui Se faire la promesse d un avenir meilleur … Juste lui et moi mes douceurs et le reste on s en fou..

Aujourd’hui hui j ai 25 ans et j ai fait le pari fou d être heureuse

Ce ventre si gros et pourtant si vide…

J’ai 27 ans, je souffre d’hyperphagie depuis des années, je suis d’après mon imc en obésité morbide, mais ce n’est pas le mal qui me ronge le plus.
Ma plus grande souffrance c’est mon anovulation…
Cette chose qui m’empêche d’être une « vraie » femme.
D’être celle que je veux être, celle que je dois être, une MAMAN…
J’ai mal au plus profond de mes tripes depuis si longtemps.

Tout a commencé en 2006 lorsque j’ai rencontré celui qui allait devenir l’homme de ma vie.
Un amour qui doit survivre à 400 km qui nous séparent. Moi sur Paris, lui en province.
Et puis un jour, 3 mois après notre rencontre, un retard de règles malgré la pilule.
Vite, un test de grossesse est fait. Il est POSITIF !!!
Pas le temps de se poser des questions mon retour pour Paris est programmé pour le lendemain.
Lendemain matin je me rends compte que je commence à perdre du sang.
Quelques gouttes, pas de quoi m’angoisser, enfin c’est ce que je crois à ce moment-là.
Trajet de train infernal, mal de ventre comme jamais…
Et puis peu de temps avant l’arrivée en gare de Paris, je me lève.
Et là je me vide, tout ce sang qui coule le long de mes jambes.
Vite je vais dans les toilettes du train et là je suis dans la peau de Carrie dans le film Carrie au bal du diable.
Je fonds en larme, je comprends tout de suite ce qui m’arrive, je m’essuie et dans ma main je retrouve ce tout « petit être ».
Il fait à peine 1cm ,mais je peux distinguer deux points noirs et ce qui ressemble presque à des bras…
La panique me prend, que faire?! je ne peux pas l’abandonner là dans les toilettes du train, ce n’est pas possible.
Je le prends avec moi, je le glisse dans un mouchoir, puis dans le sachet de kleenex vidé 2mn plus tôt pour m’essuyer les jambes.
Ensuite je dois prendre ma valise, le train arrive à quai, je suis seule, je dois me débrouiller.
Il faut que je prenne le métro, puis le RER pour arriver à destination, tant pis je ne peux pas rester là sans rien faire.
Tout le monde me regarde pleurer, pas une seule main se tend vers moi.
Je vais dans les toilettes de la gare, je me change et je vais dans les transports.
J’ai quitté mon corps, je suis en pilotage automatique, je ne me souviens de rien.
J’arrive enfin à destination.
Ma mère m’accompagne à l’hôpital, on me fait une prise de sang, on regarde si tout est bien parti, on me dit que j’ai ma tension un peu élevée (un peu normal après ce que je viens de vivre non?! pfff) et je rentre à la maison.
J’ai prévenu mon chéri, lui aussi est sous le choc. Mais là où il se trouve, il ne peut rien faire de plus que de me parler.

L’après fausse couche est vraiment difficile, j’ai un vide en moi, un vide énorme.
Ce vide je le remplis avec la bouffe, pendant deux ans je vais me remplir avec tout, en deux ans je prends 20 kilos.
20 kilos en plus du surpoids que j’ai déjà, c’est énorme, c’est trop, beaucoup trop.
Et puis l’envie d’être maman me hante. Alors, je commence à acheter plein d’affaire pour bébé.
Ca me fait du bien, je suis comme un oiseau qui prépare son nid, j’empile les affaires comme des brindilles.
Mais le bébé, lui n’est toujours pas là.
Je consulte un premier gynéco, il me prescrit un traitement mais vraiment à contrecœur, pour lui mon problème c’est mon poids.
Une semaine et demie de piqûres. Aucun résultat (forcement en si peu de temps, je ne suis pas wonder woman) du coup il m’envoie chez une consœur et là elle me dit, « il faut absolument perdre du poids, je ne ferais rien pour vous, pour passer en fiv il faut un imc de 35 max et le vôtre est de 47, revenez me voir quand ça sera fait »
Je pleure, je pleure toutes les larmes de mon corps.
Pourquoi ? pourquoi à cause de mon poids je dois souffrir encore plus? Pourquoi je n’ai pas le droit d’être comme toutes les autres femmes ?
Depuis je me bats seule contre mon poids, contre mon hyperphagie que je maitrise mieux et contre ces médecins qui ne me jugent que par mon imc.
Je suis inscrite dans un centre pour perdre tous ces kilos puisqu’on m’y oblige.
Mais la douleur de ne pas avoir droit au bonheur est tellement difficile à vivre que chaque jour je me demande si je ne devrais carrément pas me faire opérer pour
être enfin considéré comme une personne normale.
Les années passent, les ventres autour de moi s’arrondissent tous, sauf le miens!
Le miens il est rond parce que je suis grosse, mais il est vide, si vide!!!
Mon souhait le plus fort est d’être MAMAN, pourquoi on ne m’en laisse pas la possibilité?
Je veux juste être HEUREUSE !!!
E.

La première fois que je suis née

La première fois que je suis née, je suis née fille et je ne savais pas que je deviendrais femme-

La première fois que j’ai réalisé que j’étais une fille, je n’avais déjà plus l’âge d’en être une… j’avais plutôt l’âge d’être une femme, mais je ne le savais pas encore.

La première fois que je suis devenue une femme, j’ai eu peur et j’ai pleuré. J’ai eu très peur et j’ai eu très honte. J’ai eu très très peur et j’en ai fait un tabou.

La première fois que je suis devenue femme, j’étais trop jeune.

La première fois que j’ai ressenti le ventre qui gratte, l’appel du ventre vide, cet instinct de survie de l’espèce, je n’ai pas compris ce qu’il m’arrivait. J’ai trouvé cette sensation étrange. J’ai appris à vivre avec elle et à ne pas m’en faire une ennemie.

La première fois que j’ai aimé être une femme, je l’ai trouvé très doux, juste comme il faut, comme fait pour moi.

La première fois que j’ai senti la vie s’installer en moi, j’ai été envahie de sentiments aussi contradictoires les uns que les autres. J’étais prête mais finalement pas prête. J’étais heureuse et effrayée. Je me suis demandée comment on faisait pour faire demi-tour si jamais on décidait que non, finalement, ce n’était pas ce que je voulais.

La première que j’ai senti la vie s’installer en moi, j’ai compris que ce chemin-là était en sens unique et que finalement c’était bien aussi.

La première fois que j’ai découvert celle qui avait habité mon ventre pendant plus de neuf mois, je n’ai pas trop su ce qu’il fallait faire. Je me suis sentie comme un oiseau sans aile ou comme avec un nouveau jouet et aucun mode d’emploi. Je me suis sentie un peu désarmée, charmée, ébahie, abasourdie par ces quelques grammes de vie. J’ai eu envie de courir, de sauter, de voler, de crier. Crier de joie et de rage, de peur et de bonheur. J’ai eu envie de partir loin mais aussi de revenir bien vite et régaler mes yeux, mon nez, ma peau.

La première fois que le sang est revenu, j’étais très en colère avec mon corps. Je n’avais pas envie de ce poids-là. Non, pas de ça…. Des envies de légèreté… de douceur… de confort…

La première fois que mon corps a donné la mort, j’ai pleuré. Je me suis effondrée. Je me suis brisée. Mon corps a saigné. Mon cœur aussi. Je n’ai pas pu lui dire au revoir, la médecine ne m’a pas laissée faire… trop petit, un petit tas de sang sans intérêt.

La première fois que j’ai senti la vie de nouveau en moi, j’ai pleuré, de joie, de peur. J’ai attendu… jour après jour… visite après visite… étape par étape pour enfin pouvoir me réjouir.

La première fois que je l’ai vue, que je l’ai sentie, que je l’ai mise contre moi, je me suis sentie soulagée de la savoir ici avec nous. Elle avait sa place, nous l’attendions. Elle était si belle.

La première fois que le sang est revenu, j’ai eu envie de crier très fort.

La première fois que j’ai accepté être devenue une femme, j’ai aussi découvert mon premier cheveux blanc. C’est aussi quand j’ai découvert mon visage avec quelques premières rides. Ces marques laissées par la douleur. La douleur qui n’a pas de nom. De ces douleurs qui déchirent les entrailles, font tourner la tête et anesthésient le contenu, le contenant devant tenir debout et continuer sa route.

La première fois que je me suis vue femme, je me suis trouvée belle. J’ai aimé mes formes. J’ai aimé les marques de la vie sur mon ventre et ma poitrine. La première fois que je me suis vue femme, j’ai aimé être une femme.

La première fois que j’ai parlé de mon utérus à voix haute, c’était sur une scène avec dans la salle des femmes mais aussi des hommes. Je me suis sentie un peu effrayée à l’idée de dévoiler la vie de mon organe. J’ai pris mon courage avec moi, je l’ai regardé droit dans les yeux et je lui ai dit qu’il devait venir avec moi. Et ça s’est bien bien passé. Enfin je crois….

Me réconcilier avec mon corps

Mon corps, j’ai longtemps été en désaccord avec lui. Ca a commencé à la puberté. J’ai commencé à avoir des poils partout sur les jambes (merci papa), et ma poitrine a surgi de nulle part. Je n’ai rien compris car je me suis retrouvée avec une poitrine qui était trop grosse et trop lourde à mon goût (merci maman) et moi qui étais d’un naturel timide, me retrouver avec ces deux obus ne m’a pas aidé à prendre confiance en moi. C’était trop voyant, comment allais-je passer inaperçu désormais ?

La puberté, l’adolescence, c’est l’âge des premiers amours, seulement moi je n’attirais pas les garçons de mon école, et encore moins ceux de mon âge. Je ne le comprends que maintenant, parce qu’à l’époque je mettais ça sur le compte de ma mocheté, de mes fringues, de ma non popularité, je me disais que j’étais une fille quelconque. Faisais-je plus vieille que mon âge ? Certainement, car j’attirais toujours des garçons plus mûrs, beaucoup plus âgés. Je l’ai surtout remarqué quand je sortais les weekend. C’est surtout cette période du collège qui m’a posé problème, me retrouver formée d’un seul coup, je n’y étais pas préparée, et puis les jeunes ne sont pas tendres entre eux. Je ne me souviens pas d’en avoir parler une seule fois avec ma mère, on ne parlait pas de ça. Mais j’ai fait avec, parce que je suis une fille docile, parce que je suis discrète, parce que de toute façon je n’avais pas le choix. Me fondre dans la masse.

 

Ce passage de ma vie a certainement laissé des traces pour le futur, je n’ai jamais été du genre à ouvrir ma gueule quand il le fallait, et non, toujours rester discrète, ne pas faire d’histoire -se fondre dans la masse- inconsciemment telles étaient mes devises!! Ma timidité a toujours pris le dessus, et puis se faire remarquer c’est risquer de se faire critiquer, d’être mal aimé, et ça, je ne sais pas pourquoi, je ne l’ai jamais supporté. Je me souviens encore d’un garçon de ma classe m’interpellant « hé la grosse! » alors qu’à bien y réfléchir, je n’étais pas grosse, je pesais 57kg (je paierai cher pour faire ce poids aujourd’hui) mais ma poitrine était imposante pour mon âge, on ne voyait que ça, je suis petite, alors voilà, on me voyait grosse, ronde, quelconque.

 

Mon corps je ne l’aimais pas, j’aurai voulu être plus mince, plus grande, avoir les cheveux raides, des yeux bleus… et bien sûr des seins plus petits ! Être tout le contraire de ce que j’étais finalement. N’empêche… je devais me sous-estimer parce que quand je regarde les photos de moi plus jeune, j’étais belle, ni grosse ni maigre, joyeuse, j’avais de beaux cheveux, et je ne m’en rendais même pas compte ! Et surtout, surtout, j’avais une vision démesurée de ma poitrine, elle me dérangeait tellement que je ne voyais que ça, je la voyais énorme ; j’ai très vite et longtemps fait un 95D, des mensurations parfaites aux yeux de certain(e)s, mais non non non je n’étais pas préparée!

 

J’aurai du en profiter en portant des vêtements qui m’auraient mis en valeur, [comme le faisait une fille de ma classe à la même morphologie que moi sauf qu’elle on la tagguait direct de salope bref] au lieu de ça je me cachais car j’en avais honte. Se fondre dans la masse. Je m’habillais large en haut, alors forcément je paraissais grosse. Mais… il fallait se fondre dans la masse.

 

Peut être parce qu’à 9 ans, un soir, j’ai subi des attouchements et que cela m’a traumatisé ? peut être que devenir femme allait vouloir dire attirer le regard des hommes et me voler à nouveau mon innocence ? je ne saurais jamais.

 

Aujourd’hui, j’ai un mari formidable (qui est plus jeune d’une année que moi, joli pied de nez). Dix ans qu’on s’aime, dix ans pour le meilleur et pour le pire, dix ans qu’il est toujours là et je sais qu’il sera là à mes côtés toute ma vie et vice et versa. Je me rends enfin compte à la trentaine passée, que s’il est avec moi c’est que je ne dois pas être aussi quelconque que ça. Quand je l’ai rencontré je pesais une « soixandizaine » de kilos, c’est beaucoup et en même temps c’est parfait pour ma morphologie, parce que dans ma famille nous avons de gros os, et je sais que je ne referai plus jamais les 57 kg du collège. Je ne suis pas de morphologie fine quoi.

 

Il a su m’amadouer au fil du temps, parce que ça n’a pas été facile, je ne supportais pas qu’il me touche les seins, objets pour moi de pornographie. Il avait beau me dire que j’étais belle, je ne le croyais pas. Je le crois depuis peu. Et puis au moins il les aime lui mes seins, pas comme moi ! Mais l’amour, c’est plus fort que tout, sa douceur et sa patience ont eu raison de ma gêne et ont fait de moi au fil du temps une amante comblée et parfaite à ses yeux.

 

En dix ans de vie commune, j’ai prix une vingtaine de kilos, sans m’en apercevoir, tout doucement qu’ils se sont installés ces enflures, et mes seins ont grossi avec, forcément. CQFD. Boulot, chômage, arrêt de la clope, dizaine de kilos, nouveau boulot, régime, soucis familiaux, grossesse, coup bas de la vie, re-grossesse, joie, vie quotidienne, encore des kilos, re régime, re re-grossesse, bonheur, maladie, soucis, et encore des kilos …. qui s’entassent, discrètement mais sûrement.

 

Inutile de préciser que je n’ai pas allaité mes enfants. Par expérience, allaiter, quand on a une forte poitrine, relève d’un vrai parcours du combattant, je l’ai fait 3 jours comme ça pour voir, parce « qu’allaiter c’est bien » qu’ils nous tannent partout, donc j’ai tenté, j’ai vu, voilà, on en parle plus. Pas à l’aise avec cet acte, pas à l’aise avec mes seins que je n’ai jamais considéré comme nourriciers, plutôt comme un danger car peur d’étouffer mon enfant. Non vraiment ça n’est pas mon truc l’allaitement. Je le laisse aux autres. Mais heureusement je l’ai très bien vécu, toujours ça de pris.

 

Fin d’année dernière, j’ai eu un déclic. Après une visite de contrôle chez mon docteur, le déclic est survenu. Côté santé tout allait mieux alors voilà c’était maintenant ou jamais. Je suis rentrée chez moi et j’ai annoncé à mon mari que j’entamais un régime, un vrai. Comme ça sur un coup de tête… Cela va faire 3 mois que j’ai changé mon mode de vie, et j’ai déjà perdu dix kilos. Je reprends confiance en moi petit à petit. Et surtout je suis fière de moi car j’en suis capable, c’est pas aussi dur qu’on le pense de tenir un vrai régime quand on est motivé. Manger équilibré et à sa faim (pas Dukkon hein, ça va pas !), tout en perdant du poids, que demande le peuple franchement ?

 

Bon… question poitrine, à force de grossir et de maigrir et re grossir, avec les grossesses, avec les années toussa, ils deviennent mous, s’aplatissent au niveau du décolleté, mais je ne suis plus du tout complexée comme j’ai pu l’être par le passé. Oh! Regretterais je mes seins d’avant !? Je les ai tellement détesté faut dire, que je les ai malmené. Mais je pense qu’en atteignant la trentaine les complexes passent au dessus, enfin c’est le cas pour moi.

 

J’ai eu le courage de me prendre en photo récemment pour me montrer aux amies car j’avais besoin qu’on me confirme que cette perte de poids se voyait. Besoin de l’entendre. Je me suis tellement fondue dans la masse que je ne suis même plus capable de me voir tel que je suis.

Je veux perdre encore dix kilos, et je serais de nouveau la jeune femme sur laquelle mon homme a flashé il y dix ans. Pour moi bien sûr mais aussi pour lui.

 

En écrivant ces quelques lignes je me rends compte que j’ai vraiment perdu du temps à me focaliser sur des détails. Quel gâchis… mais c’était certainement nécessaire à ma construction.

 

La nouvelle Moi est en train de naître. Je ne me fondrais plus dans la masse.

Corps de rêve, corps rêvé, apprivoisé, subit.

J’ai un beau visage. Je m’en fou de l’avis des autres. J’ai un beau visage. Je l’aime. C’est tout. Mon ventre est une bouée de sauvetage. Je sais nager, je n’ai plus besoin de bouée. Je ne l’aime pas cette bouée.

Je ne suis pas faite pour la minceur. Je suis jolie à 75/80kilos. Mais impossible d’en trouver le chemin. Les psychologue de comptoir balance que c’est une carapace, que je veux me protéger. Les autres, que c’est un détraquement hormonal.

J’ai connu l’anorexie, la boulimie prandiale. 2 enfer. Le premier m’a rendu trop jolie. Oui, on peut-être trop jolie quand on cette fragilité. Façonné, éduqué par un pédophile, j’ai des portes ouvertes sur l’agression sexuel. 3 faucheur de corps, de cœur. Une plainte, classé sans suite, contre le dernier. Il a re-violé parait-il. Etonnant ? Les deux autres faucheurs, un père, mort. Même pas mon père biologique. Je l’ai su tard. C’est quand même fou ce que je lui ressemble. L’autre, il vit sa vie. Il fréquente toujours des enfants. Je ne peux oublier leurs odeurs, leur gout… le plaisir forcé, mécanique. Bordel, le jour où j’ai lu cette canadienne victime d’un père abuseur parler de ça. J’ai dit « oh, je ne suis pas seule, pas folle, pas perverse ». Alors, il parait que j’ai une carapace de graisse à cause de ça.

Merde à la psychologie. J’en parle là. Mais 10 ans de psy, un bon psy. Je n’ai pas peur de jouir, de vivre, de rire, de pleurer, d’aimer, d’avoir du plaisir, de la peine, de la colère, de la joie.

Je suis grosse, et je ne bouffe pas. Je mange assez peu.

Je le connais mon corps rêvé. Un peu moins gras. Un peu moins.

Ca y est, toute façon, je mets du 46. Je peux m’habiller ailleurs que dans les grande taille. Ça ne vous scandalise pas les « grandes tailles ». On n’a pas le droit à la même mode. Non c’est « ample », toujours un peu « fou ». Oui. Bon ça va 5 min. Je n’ai pas envie d’avoir soit du fou-fou flashy au couleur que je n’aime pas ou du sérieux terne. J’ai envie d’être femme. Il parait que ça existe. Mais je n’ai pas le budget. Fait chier.

Je m’en fou, j’y arriverais au 42.

J’ai 2 enfants. A la naissance du 2°, j’ai voulu être « femme », « féminine ». Un tour chez le coiffeur, un cours de maquillage… des jupes.

Mon corps, il n’est pas facile. Il est usé. Ma peau est fragile, sensible au stress. Psoriasis, tu serras le feux entre mes cuisses. On ne le sait pas, mais le psoriasis « en milieu humide » ça brule. Oui, humide. En été, mes grosse cuisse se frottent aussi l’une à l’autre. La chaleur, la sueur, la brulure. Je mets des cycliste pour éviter ça. Le moindre stress, c’est le cuisse, les coudes, la tête. Ça gratte, ça pique.

Je n’aime pas les photos de femme enceinte. Elles ne sont pas des bouée échouée sur une plage ces femmes. Elles sont belles. On la voit leur grossesse. Moi, je le sens cet utérus qui grandit, qui prend de la place, sous ma graisse. Il est volumineux. J’entame mon 4°mois. Personne ne le voit avant le 7 ou 8 mois que j’ai « un hôte ». Moi aussi je voudrais pouvoir montrer au monde ma rondeur, ma douceur maternelle qui accueille cette hôte pas programmé, mais désiré par la réunions de nos inconscients. (Oui, je m’autorise un brin de comptoir psy).

J’aimerais faire ces jolies photo « mois à près mois ». Ça me fait rêvasser. C’est beau de voir la vie grandir. Mais non. Y a une bouée de sauvetage qui me coule à la place. La graisse va se déplacer sur les côtés. C’est tout.

Ironie du sort. Enceinte, je perds du poids. Ce qui confirme la thèse « hormonal » pour ma doc. Mais voyons, comme j’allaite « encore », je n’ai pas vraiment le droit à une attention médical, et au final… J’ai tellement à gérer. Un fils avec un léger handicap pas du tout reconnu par les médecins, un autre qui est à une légère perde d’audition à cause d’un traitement, des problèmes de tune (comme tout le monde), bosser, m’occuper de la vie courante… Je me calle « quand » pour un bilan de santé ? Entre 7h00 et 7h01 ? Je préfère dormir. Désolé, j’en ai besoin.

Le plus drôle, c’est que ce petit topos rapide de mon quotidien doit faire croire que je le déteste. Mais non. J’aime m’occuper de mes zouaves. J’aime accompagner le premier qui a 4 ans et demi ne sait toujours pas dessiner un bonhomme, a du mal à causer. J’aime sa présence, sa clarté, son univers, ses passions. Mon second, il compense admirablement à légère perte. Il me montre ce que c’est un enfant qui se développe a un rythme classique. Un enfant qui dit ses premiers mots, qui a une pèche, qui est drôle, surprenant et qui me montre qu’il est prêt à plein d’expérience nouvelle, qui marche enfin dans la rue… J’adore faire de la photo, mon métier que je lance bénévolement depuis trop longtemps. J’aime faire des sites web pour les autres. J’aime mes projets d’atelier qui commence. Bordel. Ma vie est BELLE.

Un jour, je ferais du 42. Je vous monterais mon cul parfait pour les mains de mon mec, l’absence de bouée de sauvetage, et même si je sais qu’un jour, je finirais en fauteuil roulant parce que mon dos a un gros problème… vous verrez que ça, ce n’est pas un soucis.

Alors voilà. 1 bouée, un beau visage, des cuisses qui brule parfois. Et une vie que je grave dans ma peau, un bébé qui pousse, 2 enfants qui grandissent, des projets, des envies. Il faut juste que je ne sois jamais nue devant une glace. Parce que là, je deteste ce que je vois.

 

PS : Étonnant… j’ai passé « sous silence » la violence physique que j’ai subit… les 15 ans de coups quasi quotidien…
Pas que je sois encore prise dedans… comme si ce n’est qu’un détails concordant avec le père violent

Mon corps, et le corps des autres femmes

Je regarde toutes les femmes, leurs fesses, leurs seins, leur jambes, leur visage, leur ventre. Je regarde si elles ont l’air bien avec. Si elles ont l’air de l’aimer, ou juste de le supporter. Mon corps, j’évite de le regarder. Non pas qu’il soit horrible, je m’en sort même plutôt bien d’un point de vue objectif et extérieur. Mais voilà, le problème de mon corps, c’est que je suis coincée à l’intérieur.

Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours eu cette sensation, être coincée dans un corps qui n’est pas le mien. Il déborde, il dépasse, il m’empêche.

Parfois j’ai l’impression que si on regarde tout au fond de mes yeux, on pourrais me voir moi, coincée, qui essaye de sortir.

Je ne sais pas pourquoi. Je n’ai jamais vécu d’horreur, pas de traumatisme particulier. Je fais un 38, parfois quand je rentre le ventre j’enfile même un 36. J’arrive même à me trouver jolie quelques fois, c’est dire! Oui mais.

Je n’aime particulièrement pas mon ventre, mou, et ce depuis toujours. Ma grossesse a été un supplice. Alors que toutes les femmes s’extasiait sur mon ventre qui s’arrondissait, alors que cette grossesse était un vrai désir, une envie de couple, j’ai caché mon ventre, le plus possible. Je n’avais pas l’impression d’être enceinte, mais d’être gonflée. Quelqu’un d’autre se cachait dans mon corps avec moi, et il n’y avait plus beaucoup de place.

Quelle horreur quand on voulait toucher mon ventre…

Bien sûr à la place de mon bébé, il y a maintenant un ventre encore plus mou, encore plus détestable. Tous les jours je me dis « demain, je commence à faire des abdos. Demain j’arrête le chocolat. » Ça fait un bout de temps que j’aurais dû commencer!

Rien de tout ça n’est grave, rien de tout ça ne m’empêche de rire, d’aimer mon mari et ma fille, de mettre des jupes parfois, d’aller à la piscine.

J’use de subterfuges, je cache, je détourne l’attention, j’ai appris comment faire à force.

C’est juste que ce corps, il n’est pas à moi. Il est comme un déguisement que je ne peux pas enlever.

Je ne me sens pas femme


J’ai 22 ans, je suis mariée, mais pourtant je n’arrive pas à avoir ce bébé.
1 an qu’on essaye, rien à l’horizon.

Ce n’est pas beaucoup 1 an, pourtant c’est horriblement long.

Je suis sous traitement pour me faire ovuler, mais vous pensez bien… Ca ne marche pas !
Mon mari a fait un spermogramme qui s’est avéré bon.

Voilà, c’est dit, le souci vient de moi !

Alors pour beaucoup c’est un problème bénin.
Sauf que moi je le vis comme une véritable souffrance.

Si nous n’arrivons pas avoir de bébé, c’est à cause de moi.
Je suis fautive.
Alors c’est sûr, si je pouvais me cacher dans un trou de souris, je le ferai !

J’ai honte de moi, je me sens sale, je me sens comme un enfant.

Tout le monde autour de nous, nous parle de bébé… Nous, nous répondons que ça ne fait pas partie de notre projet.
Quel mensonge !

Ma plus grande souffrance est de ne pas offrir à mon mari ce dont il rêve le plus !

Mon objectif de cette année ?!
Ovuler ! Je veux juste ovuler, ni plus ni moins.
Après peut-être qu’on sera parent, mais on n’en ai pas encore là.

Je pourrais vous montrer mes ovaires en photo, mais il en est ainsi.

Minouchette.

A celui qui m’a offert un rein

 

« Voici mon nouveau ventre, marqué par une cicatrice, cicatrice que j’aime même si elle est encore assez douloureuse et gonfflée, cicatrice nouvelle, synonyme d’une nouvelle vie… J’ai éprouvé un besoin d’écrire après ce que je viens de vivre, merci à celles et ceux qui prendront le temps de me lire jusqu’au bout. »

 

12 février 1981 – 9h09.
‘‘ Dépêchez-vous, faites une césa, sortez- moi ce bébé, il est trop petit pour être viable, il faut tout faire pour sauver la mère!’’
Les médecins s’affairent autour de ma maman, elle perd beaucoup de sang. Moi, je suis posée sur une table toute froide, à l’intérieur de ma bulle. Que dois-je faire? Me laisser partir ou montrer un signe de vie?
Une infirmière: ‘‘ Mon dieu, docteur, le placenta bouge, le bébé est en vie!!!’’
Tout s’accélère, on m’extrait de ma bulle, tout un petit monde s’affole autour de moi, ils appellent un hélico pour me transférer dans un service pour grands prémas.

Ma maman a lutté pendant plusieurs jours mais je ne l’ai plus jamais revue, aucun souvenir, elle s’est envolée….

Heureusement, ma sœur ainée m’a immédiatement prise sous son aile et a fait chaque jour la longue route qui la séparait de l’hôpital pour s’occuper de moi, pour me dire à quel point elle m’aimait et à quel point elle me protègerait, pour me dire à quel point elle serait ma maman alors qu’elle venait de perdre la sienne…

C’est-ce qu’elle fit chaque jour de sa vie et ce qu’elle continue à faire jour après jour. Ce début de vie chaotique m’a au moins permis de recevoir le plus beau des cadeaux: une mère exceptionnelle et quelques années plus tard, une petite sœur prénommée Justine à qui je voue autant d’amour qu’à ma maman qui nous a élevées seule.

Cependant, cette naissance hors du commun a laissé des séquelles, assez lourdes: mes reins sont malades, un jour ou l’autre une greffe sera indispensable ou la dialyse inévitable. J’ai 11 ans, je comprends que c’est grave mais je décide de vivre normalement sans y penser avant d’y être forcée.

Adolescence normale, avec ses hauts, ses bas, ses délires entre amis, ses chamailleries et ses secrets entre sœurs, ses premiers émois amoureux … Tout va bien, je ne pense à rien.

Maman rencontre un homme merveilleux, un nouveau papa pour ma sœur et moi et un souffle doux et chaud d’amour sur son cœur meurtri par les désillusions précédentes dans sa vie.

 


1er avril 2000
Je fête le carnaval de ma ville avec mes amies, excellente soirée. Tout à coup, un jeune homme déguisé en ange, passe. Coup de foudre, je l’assure, il sera mien. Je me rends rapidement compte que son déguisement lui sciait parfaitement car ce soir-là, sans le savoir, j’ai réellement trouvé mon ange gardien et je ne l’ai plus quitté.

 


19 mai 2005
Naissance d’Ethan, notre trésor, notre combat, je savais qu’avec mon insuffisance rénale, une grossesse était risquée mais je l’ai vécue sereinement en étant régulièrement suivie par un néphrologue. Nous avons décidé d’avoir un bébé, nous n’avons demandé aucun avis médical, tout s’est fait naturellement. Par la suite biensûr, j’ai voulu exclure un maximum de risques et ma grossesse a été très surveillée. Malgré ça, je l’ai vécue comme sur un nuage et la naissance d’Ethan reste l’un des plus beaux instants de toute ma vie. Un beau bébé de 48cm et 2kg950. Le temps passe, nous sommes heureux tous les trois.

 


1er Janvier 2006
Une petite surprise vient se loger dans le creux de mon ventre, nouvel émoi, nouveau bonheur.
Je travaille chez une pédiatre, j’adore mon job mais il va malheureusement me causer un grand drame. A force d’être en contact avec des enfants malades, je contracte le CMV durant ma grossesse. J’apprends le même jour que j’attends une petite fille mais je n’arrive pas à me réjouir de ce si beau miracle comme si je préssentais un grand malheur. Etant donné ma grossesse risquée, mon gynécologue m’envoie dans un grand hôpital à Bruxelles pour subir une amniosynthèse. Moment catastrophique et dépourvu de toute humanité. Après ce geste barbare, j’ai compris que j’allais perdre ma fille.

 


24 mai 2006 – 19h
Je le savais, les contractions commencent, violentes, tout de suite. Je décide de prendre une douche mais je sens la tête du bébé. Urgences. On me fait une péridurale et on me dit que ma fille va mourir pendant l’expulsion. ‘‘ Courage madame, on sait que c’est affreux mais vous n’avez pas le choix, il faut pousser’’. Je m’y refuse bien que je sente la tête de ma fille entre mes jambes, je veux qu’elle retourne d’où elle vient, au chaud, au creux de moi mais, à un moment, je n’en peux plus, il faut que je pousse luttant contre les forces contraires de mon corps. Léna est un très beau bébé, minuscule certes, mais magnifique. Je l’aie dans les bras mais ne parviens pas à réaliser ce que je vis. Un cri d’effroi et de chagrin ébranle les couloirs de la maternité. Cauchemar. Tout est fini. 5 jours plus tard, je porte ma douce petite en terre.

Période très dure pour mon homme et moi, notre couple en subit d’ailleurs quelques turbulences car nous vivons notre deuil d’une manière très différente et souvent, l’incompréhension s’installe. Heureusement, notre fils et l’amour que nous nous portons nous aident à survivre chaque jour. Nous n’abandonnons pas malgré les mises en garde des médecins. Ethan aura un petit frère ou une petite sœur, c’est notre vœu le plus cher.

 


Octobre 2006
Nouvel espoir. Je suis enceinte. J’ai peur mais je veux y croire. Ce petit être a dû sentir en se lovant en moi que la place était encore beaucoup trop occupée par une petite fille l’ayant quittée beaucoup trop tôt. Il la quitte à son tour après 2 mois.

J’abandonne. Je ne veux plus entendre parler de bébé, la douleur est trop intense. Je décide de me réfugier dans mon rôle de maman et de femme. Je savoure chaque instant avec mon petit Ethan, je ne pense qu’à lui, il est ma raison de vivre. Je partage tout l’amour que j’ai à donner entre mon mari et mon adorable petit garçon.

 


Décembre 2007.
Alors que je ne m’attends plus à rien et que je profite de chaque jour de bonheur avec mes hommes et de chaque jour de répis que m’apporte ma maladie, je me décide néanmoins à faire un test de grossesse car cela fait deux semaines que j’aurai dû avoir mes règles. Il est positif, tout de suite, un + bien rouge! Est-ce possible? Serait-ce le plus beau des cadeaux de Noël un peu en avance? J’aborde cette nouvelle grossesse avec beaucoup plus d’angoisse et ne parvient pas vraiment à extérioriser toute la joie que je ressens tant j’ai peur que ce petit miracle glisse à nouveau lentement de mon corps….

Les mois passent, je dois bien finir par constater que tout se passe bien. Le bébé est bien accroché et semble bien décidé à signer un bail de neuf mois dans sa piscine privée chauffée à 37. Je me détends un peu, mais un peu seulement. Je me décide à faire quelques leçons de sophrologie car je n’ai pas envie de donner naissance à un petit être angoissé. Ces séances me font beaucoup de bien. Néanmoins, au plus la grossesse avance, au plus je veux qu’elle se termine! J’ai tellement peur que quelque chose se passe mal que je me dis sans cesse que ce bébé serait sans doute mieux à l’extérieur que dans la boule d’angoisse qui est censée le protéger.

 


19 juillet 2008.
Je rentre à l’hôpital, j’ai des contractions et mon col s’ouvre doucement. Les médecins comprennent rapidement mes craintes et décident de me garder sous surveillance en proposant de provoquer l’accouchement en douceur le lendemain si rien ne vient naturellement avant. Cette nouvelle m’arrive comme un soulagement. Je sais que ce bébé aurait dû encore rester au moins 3 semaines dans mon ventre mais je me sens si mal que le fait de savoir que je vais l’avoir dans les bras plutôt que dans mon corps meurtri, me remplit de plénitude. Je ne dors pas mais je suis bien.

 


20 juillet 2008 – 8h.
On m’installe en salle de travail et on m’explique qu’on va m’injecter un produit de manière régulière mais pas trop rapide pour accoucher en douceur. Moment de rêve et de détente absolue. L’équipe médicale qui me suit me laisse faire tout ce que je veux: je me promène, Cédric me masse, on m’installe dans un bon bain chaud, un vrai bonheur! Je suis tellement bien que bientôt les infirmières m’annoncent qu’on va pouvoir m’installer pour l’accouchement. Je me sens tout à fait bien mais ils décident néanmoins d’appeler l’anesthésiste pour pratiquer une péridurale parce qu’à cause de ma maladie, ma tension monte beaucoup trop. A peine le temps de poser la péri que je pousse. Une fois, deux fois, trois fois… ‘‘Elle est là madame, venez la chercher!’’. J’attrape ma petite puce à bout de bras et la pose contre mon cœur. Elle s’appelle Maé, pèse 2kg620 et mesure 46 cm. Elle est magnifique. Moment magique pour son papa, elle et moi. Nous avons réussi, Ethan est aujourd’hui le plus heureux des grands frères.

Rien n’est plus beau que notre nouveau bonheur à quatre. Merci Léna, merci mon ange, mon étoile, d’avoir veillé sur ta petite sœur tout au long de ma grossesse difficile et de m’avoir envoyé ta poudre magique pour qu’elle se termine si bien. Nous sommes heureux.

 


20 septembre 2008.
Un bonheur n’arrivant jamais seul, je me fais passer la bague au doigt, l’ange Cédric croisé 8 ans auparavant devient mien pour l’éternité, je savais que ce jour arriverait. Tout est au rendez-vous pour que cette journée soit parfaite: nos enfants sont à nos côtés, beaux comme des trésors, le ciel est bleu, le soleil brille, je me sens jeune, belle et épanouie dans ma jolie robe ivoire, mon futur mari est plus élégant que jamais et je suis emplie d’émotion lorsqu’il m’offre un splendide bouquet d’amour. Tous nos proches et amis sont réunis, tous ces gens qui comptent tant à nos yeux et dans nos vies, ces personnes que l’on aime tant sont témoins en ce jour du plus beau et du plus attendu des ‘‘OUI’’.

La vie suit son cours, la maladie aussi. Je sais que les résultats d’analyses sont mauvais et que la dialyse rode de plus en plus autour de moi mais je continue de savourer chaque instant avec les miens en me disant que tant que je n’y suis pas, je n’y pense pas!

 

Début 2010.
On découvre à ma petite maman un cancer du sein. Je m’effondre littéralement, je pleure comme jamais mais, devant sa force et son courage, je ne peux que ravaler mes sanglots et la soutenir à fond dans son combat! Des mois de douleurs, de fatigue, d’angoisse mais cette femme, si battante, si exceptionnelle a gagné. Dégagé cette boule nocive qui la rongeait de l’intérieur. Morte. C’est la plus forte ma maman, son caractère de guerrière, toujours positive, toujours en action, toujours souriante ne pouvait que venir à bout de ce mal tentant sans cesse de s‘insinuer!

 

Fin 2010.
Mon néphrologue m’annonce qu’il va falloir sérieusement commencer à penser à m’inscrire sur la liste européenne des demandeurs d’organes. Au départ, je refuse catégoriquement, cette intervention me fait beaucoup trop peur et j’ai eu le tord de refouler cette foutue maladie au plus profond de moi jusqu’à ce qu’aujourd’hui elle m’éclate en pleine figure, une gifle. Il m’explique les options qui s’offrent à moi et notamment celle d’un don venant d’une personne de ma famille. C’est ma marraine qui fait ce pas merveilleux vers ce choix de me sauver la vie. Malheureusement, sa santé, notamment des problèmes d’hypertension, l’empêche d’être une donneuse potentielle. Mais je la remercie de tout mon cœur d’avoir voulu faire les démarches pour cet acte si difficile et si peu anodin, d’avoir voulu m’offrir une seconde vie.

Mon salut viendra une nouvelle fois de mon ange, vous savez ce si beau et doux jeune homme rencontré 10 ans auparavant? Mon mari, ma moitié, mon Cédric à moi. Pour lui, c’est une évidence, je suis sa femme, la mère de ses enfants, s’il le peut, il me donnera un rein.

D’abord, je fonds d’admiration devant cette déclaration d’amour et de don de soi que je trouve tout simplement magique et exceptionnelle mais je refuse. Je refuse pour mes enfants. J’ai peur, et si ça devait mal se passer? Et si il devait y avoir des complications? Pour moi, ce n’est pas concevable que mes petits aient leurs deux parents en même temps sur la table d’opération. Il faut que leur papa soit présent pour eux le jour où je devrai subir cette greffe.

Les médecins ne cessent de m’encourager à accepter, en m’expliquant tous les bénéfices de cette greffe de rein d’un donneur vivant et surtout en me rassurant sur le fait que Cédric vivrait très bien avec un rein. Je me documente, je lis beaucoup de témoignages, je rentre en contact avec des gens qui l’ont vécu. Je réfléchis.

 

12 avril 2011.
Nous nous rendons à Saint-Luc, grand hôpital bruxellois, pour commencer toute une série de tests nous assurant ou non la compatibilité de nos corps pour ce don. De nombreux allers-retours, de nombreux examens, une Céline toujours en proie au doute et à la peur, un Cédric toujours serein, rassurant et confiant. Un jour, le verdict tombe: nous sommes compatibles.

 

Septembre 2011.
Rencontre avec le chirurgien qui nous confirme que tous les feux sont au vert pour la greffe et qu’il nous suffit de subir les derniers examens début octobre avant de programmer la greffe.

 

Octobre 2011.
Tous les derniers examens sont bons. Apparemment mon petit homme a des reins magnifiques, le chirurgien nous explique qu’il va lui prélever le rein gauche et me le transplanter à droite au niveau de l’abdomen. Je n’attends qu’une chose, la date de l’intervention. Tout cela me semble tellement abstrait, incroyable, impossible, extraordinaire que j’ai besoin de quelque chose de concret: une date, un compte à rebours, il tombe: nous nous ferons opérer le 31 octobre 2011.

Mon dieu, ce que c’est proche, ce n’est pas possible, comment vais-je faire pour être psychologiquement prête d’ici là? Comme à son habitude, Cédric fait preuve d’un sang froid et d’une ‘‘zenitude’’ qui me déconcertent quelque peu. Dans ma tête tout s’active, tout se mélange: il va falloir préparer les enfants, bien qu’ils soient au courant depuis longtemps de ma ‘‘petite maladie’’ comme ils l’ont bâptisée, ainsi que des démarches que nous faisons pour que leur papa puisse me donner un rein pour que je puisse faire de ‘‘beaux pipis’’. Ethan est enchanté par la nouvelle, il est persuadé que tout va bien se passer et que son papa va me guérir. Pour Maé c’est un peu plus abstrait, ce à quoi elle pense déjà c’est au moment où nous pourrons rentrer à la maison tous les 4… Je prépare nos valises: pour l’hôpital, pour les enfants qui vont rester chez maman, et oui, une nouvelle fois c’est Wonder mother qui va assurer pendant notre hospitalisation épaulée par ma sœur chérie Justine qui va faire son maximum pour l’aider et mettre ainsi sa vie entre parenthèses pendant un long moment. Tout est prêt.

 

30 octobre 2011.
C’est avec une émotion indescriptible que nous déposons les enfants chez maman et avec une énorme boule dans la gorge que nous serrons nos enfants contre nos cœurs. Mes beaux-parents vont aller nous déposer à Saint-Luc pour l’intervention. Arrivés là-bas, on s’inscrit puis on s’installe dans la même chambre, on sait qu’on va la partager pendant un petit moment alors, on décide d’en faire ‘‘notre chambre’’: cadre de famille, portes-photos avec les enfants, on installe nos affaires et on soupe en amoureux les délicieuses tartines servies à l’hôpital comme si nous mangions en tête à tête dans un grand restaurant.

 

31 octobre 2011.
Après une nuit mouvementée, peu rythmée par le sommeil, les brancardiers viennent chercher Cédric vers 7h, ils lui proposent de prendre une douche, d’enfiler la tenue chirurgicale et de le descendre au bloc. Il s’exécute, le plus calmement possible, toujours le sourire aux lèvres. Ils emmènent le lit. Je l’embrasse et lui dit que je l’aime mais aucun autre mot ne parvient à sortir de ma bouche tant l’émotion m’étreint. Je retiens mes larmes jusqu’à la fermeture des portes de l’ascenseur et puis je fonds en longs sanglots chauds et perdus. Perdue, j’étais perdue, ça y est, on allait lui enlever un rein, un rein pour moi, plus question de dire non, de vouloir revenir en arrière, il allait falloir assurer! Heureusement, comme d’habitude, ma petite maman arrive très vite à mes côtés pour me soutenir. Quel réconfort de me lover dans ses bras si tendres et si forts à la fois, dieu que j’aime cette femme qui arrive toujours dans ma vie quand j’en ai le plus besoin, comme j’aimerai pouvoir prendre soin d’elle comme elle prend soin de moi, j’ai l’impression que c’est une force de la nature, elle a le don de la maternité et de l’amour comme personne. Elle subit avec moi les longues heures qui nous séparent des nouvelles de mon Cédric. Comme c’est long. Nous examinons le couloir du service transplantation sous toutes ses coutures sans savoir quoi faire d’autre à part prier en se serrant la main. On erre.

11H30: on vient enfin nous dire que l’intervention est terminée et que tout s’est bien passé. Cédric est en salle de réveil. Soulagement. On me demande à mon tour de prendre ma douche et d’enfiler la blouse. Mon lit traverse le couloir, la main de maman dans la mienne. Je ne parviens plus à penser à rien, j’ai l’impression de voler au-dessus de ce qui est en train de se passer, de vivre la scène de loin. Le fait de lâcher la main chaude et douce de maman me ramène à la réalité. Ca y est, je suis toute seule maintenant, ils vont me descendre au bloc et je ne pourrai rien faire d’autre que ce qu’ils me demanderont.

Je me rappelle d’une pièce verte, hexagonale, avec une immense lampe suspendue au milieu. L’anesthésiste m’explique qu’il va me mettre sous oxygène et me faire une injection pour m’endormir, je ne bouge plus, comme encrée sur la table, plus aucun geste.

‘‘ Vous avez des enfants?’’

‘‘ Oui’’

‘‘ Combien?’’

‘‘ Deux ’’

‘‘ Comment s’appellent-ils?’’

‘‘…….’’

Ca y est, je suis partie très loin, plus aucun souvenir à partir de ce moment.

Quelques heures plus tard, en salle de réveil. Une dame penchée sur mon lit:

‘‘ Vous allez bien madame?’’

‘‘ Ethan et Maé’’ lui ai-je dit. Comme si je répondais à l’anesthésiste qui m’avait posé la question quelques heures auparavant. Oui je pense que j’allais bien, je me sentais un peu comme droguée et très fatiguée, j’avais juste envie de dormir, je sentais que j’avais des tuyaux un peu partout mais ce n’était pas grave, je n’avais pas mal, juste cette irrésistible envie de dormir…

18H: on me remonte dans ma chambre mais je ne me souviens de rien, je sais que ma maman était là, j’ai retrouvé la chaleur de sa main sur ma joue mais c’est tout. Il y avait d’autres gens, des paroles, des caresses, des bisous posés sur ma joue mais je n’arrivais pas à me réveiller.

Les 3 premiers jours post-op se sont plus ou moins passés de la même manière, je me souviens que les infirmières me manipulaient pour les soins et la toilette, je me souviens que des gens venaient nous voir mais moi, la seule chose qui m’importait c’était de voir mon homme à mes côtés et dormir, toujours dormir. Un petit coup sur la pompe à morphine quand je sentais la douleur monter puis j’étais repartie comme si je n’avais plus dormi depuis des semaines.

A partir du 3ème jour, j’ai commencé à réellement me réveiller et les douleurs aussi d’ailleurs!! J’ai réalisé que ma cicatrice était immense, à peu près 30 cm et je l’ai trouvée très laide et douloureuse bien que les infirmières ne cessaient de m’affirmer qu’elle était magnifique, ce qui, j’avoue, commence à se confirmer aujourd’hui. J’ai eu très peur aussi en constatant que je ne sentais plus du tout le haut de ma jambe droite, ils ont apparement touché un nerf en écartant les muscles pour transplanter le rein et il va me falloir plusieurs mois pour récupérer toutes les sensations dans le haut de ma jambe, c’est assez gênant. Cependant, ce qui fût ma plus grande douleur c’est lorsque j’ai regardé Cédric et que j’ai vu son visage déformé par la douleur. Je me suis vraiment sentie désemparée à ce moment-là, j’aurai juste voulu revenir en arrière pour ne pas le voir souffrir à cause de moi. Il m’a rassuré en me disant qu’il ne voulait en aucun cas m’entendre parler comme ça. Notre séjour à l’hôpital n’a pas été des plus reposants, nous avons tous les deux beaucoup soufferts, c’est là que j’ai réalisé qu’une greffe de rein ce n’était quand même pas rien, on a compris ce que souffrir voulait vraiment dire! Moi, je me disais que je n’avais pas le choix, que c’était pour un mieux après, que j’allais avoir une nouvelle vie en forme et que je pourrai m’éclater avec mes enfants. Je savais que je ne souffrais pas à ce point pour rien. Mais lui, ce pauvre Cédric, il souffrait pour moi. Je priais chaque jour pour qu’il aille mieux. Il a eu quelques douloureuses complications mais a finalement pu quitter l’hôpital 11 jours après l’intervention. J’étais vraiment heureuse pour lui car il n’en pouvait plus d’être là. Mais lorsque mes parents et les enfants sont venus le chercher, j’ai une nouvelle fois eu beaucoup de mal à retenir mes larmes lorsque je les ai tous vus partir. Ces portes d’ascenseurs ont déjà dû en voir couler des larmes en se refermant!

J’ai eu moi aussi quelques complications, j’ai craqué plusieurs fois poussée par la distance et le manque douloureux des miens. Les pleurs étaient mon seul exutoire. J’ai vraiment eu des hauts et des bas. Des jours où je me disais ‘‘allez ma vieille, bats-toi pour ce merveilleux cadeau, bats-toi, il va te permettre de vivre comme tout le monde pendant des années, bats-toi pour cette preuve d’amour, la plus belle qui soit!’’ et le lendemain, quand les nouvelles étaient mauvaises, je m’enfonçais toute seule dans un dédale de désespoir…

Un soir, une rencontre. Ma nouvelle voisine de chambre venait se faire opérer de la thyroïde. En attendant qu’elle remonte dans le service, j’ai discuté avec son mari, un maître yogi. Je lui ai expliqué mon histoire dans les grandes lignes et il m’a apporté le déclic qui me manquait:

‘‘ Ce nouveau rein, c’est comme un bébé que vous devez protéger en vous. Enceinte, vous faites attention à ne pas boire, à ne pas fumer, à ne pas manger n’importe quoi, vous évitez les actes qui pourraient le faire souffrir, vous ne vous désespérez pas en vous disant qu’il va mourir. Si on vous dit qu’il est malade la seule chose que vous voulez c’est le soigner et bien pour votre rein, c’est pareil, il faut le choyer comme un bébé, c’est le vôtre maintenant, à vous d’en prendre soin et il va finir par s’épanouir en vous le jour où vous serez épanouie de l’avoir en vous.’’ Sagesse. Mots forts. Métaphore qui me parle profondément. Hasard ou coïncidence, les médecins ont décidé de me laisser sortir ce soir-là malgré des résultats mitigés, après 18 jours d’hospitalisation, ils se sont dit qu’un retour à la maison auprès des miens ne pourrait m’être que bénéfique. Quel bonheur lorsque ma sœur est venue me chercher! Ma valise n’a jamais été aussi vite bouclée! Depuis, toute ma petite famille loge chez ma maman le temps que Cédric et moi soyons à nouveau d’aplomb pour s’occuper des enfants et de toutes les tâches quotidiennes de la maison. Quel bonheur d’être dans cette belle maison, qu’on appelle en ce moment l’Auberge Espagnole étant donné le nombre de gens qui passent et qui y repassent, ma sœur qui vient y dormir aussi pour s’occuper des enfants le matin pour l’école, Michel et maman qui acceptent avec joie toute notre petite famille malgré le sacré changement que ça provoque dans leur vie de couple, le salon transformé en salle de jeux, les enfants qui jouent, qui chantent… Je pense que c’est ça le secret de la guérison! Je commence à m’épanouir avec ce nouveau rein, on s’apprivoise lentement comme le petit Prince a apprivoisé le renard et j’ai confiance en l’avenir et en la nouvelle vie que l’amour de ma vie va me permettre de vivre.

Cédric, je ne parviens pas à t’exprimer tout ce que je ressens, tout cet amour, toute cette reconnaissance. Merci pour ce que tu as fait pour moi, c’est tellement extraordinaire que parfois, j’ai encore du mal à réaliser. Tu es un homme exceptionnel, mon héros, et un papa super-héros pour nos deux enfants. Je t’aime de tout mon cœur et je sais que cette merveilleuse aventure ne nous apportera que du bonheur….

Mes marques d’amour

Mon corps…Ce corps que j’ai et que j’ai tant de mal a apprivoiser depuis ma grossesse…
20 ans, je tombe enceinte.. Un réel bonheur, un enfant désiré que l’on aime déjà avec son papa…
Le temps passe, mon corps se modifie… Au début un petit ventre de femme enceinte, mignon, tout rond, puis un ventre de plus en plus gros…
Un soir, en prenant ma douche, je regarde avec effroi cette première vergeture qui est apparue. Je me souviens de ce jour comme si c’était hier.
Je me suis effondrée, j’ai pleuré durant de longues minutes, inconsolable… Si seulement j’ avait vu mon ventre quelques mois plus tard, a la fin de cette grossesse…
Plus les jours passaient, plus j’en avait … Elles était violettes, larges et profondes… Je ne maitrisait plus ce corps qui changeait…

Je maudissait ces femmes, qui avait un corps parfait après 2, 3 grossesses ..Pas une vergeture, pas un bourrelet, des cuisses filiformes …
Je bouillonnait au fond de moi, quand « les bonnes copines » me disaient (et me disent encore…) « Ohhhh mais tu aurait du mettre de la crème anti vergetures…. » ( c’est ca, prend moi pour une conne, comme si je n’en avait pas utilisé des litres et des litres sur ce ventre…)

Aujourd’hui, ces vergetures ont pris une couleur nacrée, mais elles sont toujours présentes.
Pas facile, le premier été, à la plage… le regard des autres…

Mais MERDE, je suis une maman, mon ventre a été sa maison pendant 9 mois. Chaque marque est une marque d’amour, et même si je le trouve laid, rien que pour cette raison, je trouverai toujours quelque chose de beau en lui…

CRM