Mon ventre-sourire

mon ventre sourire

Il y a 6 mois, j’ai accouché par césarienne. Qui l’eut cru ? Moi, l’enfant violée qui étais terrifiée à l’idée d’une grossesse.
En arriver là fut un combat : combat pour retrouver l’envie de rester en vie, combat en justice, combat pour mener une vie de couple normale, combat pour réussir professionnellement, combat pendant plusieurs années de thérapie pour accepter l’idée de vivre avec moi-même.
Puis je me sens un jour suffisamment bien dans ma peau et dans ma vie pour avoir le désir de fonder une famille. Je me sens même prête à supporter une grossesse, moi qui n’ai longtemps juré que par l’adoption. Enceinte, je m’apprête à livrer un nouveau combat : je vais régulièrement voir une psychologue, m’entoure de praticiens compétents, avertis chacun d’entre eux de mes réactions angoissées à tous les examens qui attentent à ma pudeur.
Se pose alors la question de l’accouchement. Et pour la première fois de ma vie, j’ai choisi de ne pas me battre. De ne pas rechercher la performance pour masquer le traumatisme : j’ai fait le choix de la césarienne. Un choix certes guidé par mes peurs et mes angoisses, mais aussi un choix de respect pour le chemin parcouru et restant à parcourir, un choix rassurant, un choix doux pour moi-même. Un choix qui dit « tu t’es bien battue, tu as droit à une pause. Tu n’as pas toujours à gagner ton bonheur, tu peux aussi juste t’en saisir ».
Et elle est née par césarienne, dans le moment le plus doux, le plus beau, le plus fort et le plus émouvant qu’il m’ait été donné de vivre. Cette enfant est une lumière. Aujourd’hui, restent mes souvenirs, et ma cicatrice. Elle ne m’a jamais fait peur, j’aimais déjà l’idée de ma cicatrice avant d’accoucher. Et maintenant qu’elle est là je l’aime encore plus. Inscrite sur mon bas ventre, que j’ai tant détesté, cette cicatrice est un sourire, qui atteste de ce que le bonheur est passé par là.
Depuis que mon enfant n’est plus dans mon ventre, mon intérieur me fait de nouveau souffrir, le combat reprend. Mais mon ventre-sourire est un espoir de me réapproprier un jour mon corps durablement, et les doux yeux de mon enfant me rappellent qu’en attendant, la vie vaut toujours d’être vécue.

J.