Je ne veux pas grandir

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Il est 3h55 quand je commence à écrire ce texte. Je ne sais pas où je vais. Je ne sais pas de quoi je veux parler. Mais après avoir lu tout ces témoignages, tout ces morceaux de vies, je ressens le besoin, la nécessité de parler de cette douleur qui me transperce. Si tant de gens le font, c’est forcément que ça fait du bien.

Alors par où commencer, quand on ne sait pas ce qu’on veut raconter ?
J’ai 20 ans. Presque 21. Pourtant ma vie me pèse. Mon quotidien me pèse. Je ne sais pas qui je suis. Je ne suis plus une petite fille. Je refuse de devenir une femme.
45kg pour 1m75. Je refuse de devenir une femme.

J’ai envie de maigrir, quitte à en crever. Je veux maigrir, jusqu’à ce qu’il ne me touche plus. Jusqu’à ce que mon corps l’effraie suffisamment pour qu’il arrête de me toucher. Pourtant je l’aime, ce garçon. Et je si le lui disait, il ne me toucherait plus. Il attendrait ma permission. Mais je ne lui dit rien. Je le laisse me toucher, me désirer. Et je prend du plaisir, au fond. Parce qu’il est tendre, et que si je voulais, si j’osais, il s’arrêterait. Il me suffirait d’un mot, d’un geste, ou même d’un regard pour qu’il s’arrête.
Mais je ne dis jamais rien. J’essaye d’arrêter de penser, d’arrêter de me souvenir, et de me concentrer sur lui. Son visage, quand il me fait l’amour. Son regard. Sa main qui caresse ma joue, ses bras qui me serrent contre lui. Je ne ferme jamais les yeux longtemps. J’ai besoin d’être sûre que c’est lui, que c’est bien lui, à l’intérieur.
Mais quelques fois, ça ne suffit pas. Alors j’enfouis mon visage dans son cou, faites qu’il ne me voie pas pleurer, pitié, et j’attends. J’attends qu’il termine, alors que d’un seul mot, je pourrais mettre fin à ce carnage.
Ce mot, je ne le prononce pas. Jamais. Si je le prononçai, il s’inquiéterait. Il me poserait des questions. Et même s’il ne les posait pas, ça ne changerait rien. Parce qu’un silence, après ces mots, « arrête, je ne peux pas », ce n’est pas un vrai silence. Ce sont que des questions, qui remplissent sa tête, mais qu’il n’ose pas poser. Des questions sans réponses qui encombrent, et viennent tout bousiller.

Mais qu’est-ce qu’il t’es arrivé ?
Qu’est-ce qu’il t’a fait ?
Pourquoi tu n’oses pas en parler ?
Pourquoi tu ne me parles pas ?
Pourquoi tu es comme ça ?
Pourquoi tu es névrosée ?
De quoi as-tu peur ?

Mais je ne sais pas ce qu’Il m’a fait. Il y a quelques années, je ne me souvenais de rien. Ça fait deux ans que je me souviens. Presque trois. Au début ce n’était qu’un étrange sentiment, quelque chose d’indéfinissable. Aujourd’hui, c’est de plus en plus concret. Je vois des images. Je me vois toute petite, trop petite pour ces choses là. Mais comment être sûre ? J’aimerais que mon esprit ait inventé ça. Mais est-ce qu’on peut vraiment inventer ça ? Ce malaise, cette appréhension, à chaque rapport sexuel ? J’aimerais qu’on me dise que tout ça, c’est faux. Que ce n’est que mon esprit, qu’il me joue des tours. Mais pourquoi est-ce que je n’arrive pas à m’en persuader ? Et pourquoi, pourquoi, est-ce que je suis dans l’incapacité de dire « non » ?

Je refuse de devenir une femme. Je veux retourner à mon enfance. Avant que tout ça se produise. Au temps de l’insouciance, du bonheur simple, naturel. Je voudrais que ma maman me prenne dans ses bras. Qu’elle me console, comme elle le faisait quand je me blessais. Qu’elle fasse des crêpes, pour quand je rentre de l’école. Cette bonne odeur de crêpes, mêlé à une autre odeur, plus maternelle. La dernière fois que je l’ai sentie, je rentrais de l’école. J’étais heureuse de sentir cette odeur avant même d’entrer dans la cuisine. Pourtant, la cuisine était vide. C’est ce jour là, que je me suis rendue compte que j’avais perdue ma mère. Pour toujours. Cela faisait deux mois qu’elle nous avait quittés. Un accident. Un suicide. Peu importe. Pour moi, à 13 ans, c’était un abandon. Qu’elle l’ait voulue ou non, qu’elle l’ait prémédité ou non, c’était un abandon. Et je n’ai plus jamais réussi à retrouver cette bonne odeur de crêpes.

Alors non, je ne veux pas grandir. Je ne veux pas connaître le sexe, consenti ou non. Je veux juste rentrer de l’école. Faire un câlin à ma mère. Et manger une crêpe.

8 réflexions au sujet de “Je ne veux pas grandir”

  1. Bonjour à toi, d’après ce que tu écris Je vois que tu as du souffrir et que tu souffre toujours d.une chose que tu ne veux avouer à personne, je constate aussi d’après ton commentaire que tu as un copain adorable doux attentionné et qui t’aime. Tu devrais lui parler, ça te ferais du bien et j.en suis sûr qu’il comprendra et sera être patient! !!! Tu n’as plus le corps d’une enfant même si tu le maltraite par le mal nutrition. J’ai connu des filles dans ton cas. Après avoir parlées ça leurs à fait le plus grand bien. Profite de la vie, dis toi qu’il y a plus mal que toi. Courage. Bisous. Karine.

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    1. Karine,

      Je ne suis pas sure que se dire « Il y a pire que moi » aide à quoi que ce soit, la douleur et la souffrance ne sont pas comparable d’une personne à l’autre. Se dire « Il y a pire que moi » c’est se culpabiliser, dénigrer sa douleur.

      Tout comme dire à quelqu’un « profite de la vie », même si je sais parfaitement que ça part d’une bonne intention, ça n’a aucun sens. Comme si elle n’y avait pas pensé plus tôt « Ah bah oui merde, je n’ai qu’a profiter de la vie et tout ira mieux ! »

      Le problème de cette jeune femme à l’air d’être si profondément ancrée en elle-même, depuis si longtemps, que je ne pourrais que lui conseiller de rencontrer un psychanalyste.
      Pour comprendre, pour oser affronter, pour se souvenir, pour mettre des mots sur la douleur. Je sais que chacun à son avis sur cette pratique, mais je sais aussi que les gens s’en sortent grâce à ça.

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  2. D’abord les sensations, ensuite les images, et le long chemin vers la vérité, puis l’acceptation, le pardon… Je connais tout ça. C’est très dur mais il est possible de s’en sortir.

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  3. Je n’ai aucune compétence en la matière et ne sais si un spécialiste pourrait vraiment aider, mais ce qui peu peut-être l’aider, c’est de rejoindre une cause, celle des femmes bien sûr ou toute autre cause sociale et dans la rencontre avec d’autres personne, échanger son vécu et son expérience e, découvrir tous les points communs que nous partageons les uns les autres et en contribuant a défendre quelque chose commencer à s’aimer un peu sois même !

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  4. Ta souffrance me touche beaucoup et m’attriste…le refus de grandir et le mal que tu infliges à ton corps et donc à toi-même, tu ne le mérites pas! Il va falloir que tu évacues les deux traumatismes que tu as subis…Ta guérison ne passera à mon avis que par une aide extérieure : un psychologue conseillé par ton généraliste !
    Je pense que tu peux également en parler à ton ami, il peut t’aider dans tes démarches. Rien n’est figé sur cette terre et heureusement les choses peuvent changer. Parler te fera un bien fou et permettra de te reconstruire. Tu es quelqu’un de fort et de bien, tu mérites d’être heureuse, c’est ce qu’aurait voulu ta maman pour toi…
    Avec de la patience, tu vas réussir à te débarrasser progressivement de ces choses trop lourdes que tu portes depuis longtemps mais il faut te faire aider absolument!
    Continu, ce que tu as commencé à entreprendre en écrivant ce texte cette nuit, c’est déjà un grand pas que tu as fait, ne t’arrêtes pas là surtout!

    Bon courage à toi !

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  5. Bonjour,
    ton témoignage me touche profondément au point que j’ai envie de te dire que je vis la même chose pas pour les mêmes raisons bien que j’ai vécu quelque chose de cet ordre …moi non plus je n’ai pas envie de grandir, j’ai un corps de petite fille et pourtant j’ai 33 ans….c’est vrai l’enfance est un endroit idyllique fait d’insouciance, on s’y sent bien et un jour tout bascule on change d’abord et on sait pas trop qui on est et si la famille ou l’extérieur en général n’accompagnent pas ce changement, il est difficile de se retrouver dans la sérénité et la confiance et le monde environnant est parfois hostile, on n’est pas armée parfois pour y faire face alors on fuit, on SE CACHE pour ne pas exister en tant que femme adulte, pour ne pas montrer sa beauté, sa féminité. Savoir dire oui, savoir dire non, connaître son corps, savoir ce qu’on ressent…demande de l’apprentissage, de la sécurité en soi…vouloir être aimée nous enchaîne aux autres alors il aut commencer par s’aimer soi même et c’est honorable d’aimer mais se sent on libre d’aimer sans contrepartie? aimer n’est pas se donner comme je l’ai toujours crue et n’est pas conditionné non plus. Il est important de faire le deuil de l’enfance en tant que passé mais on peut garder cette pureté d’enfant, cette innocence, cet insouciance même adulte aussi non? on peut garder une part d’enfant en soi, notre âme d’enfant.
    Je te souhaite de trouver le chemin, TON chemin qui te conduira vers la libération et vers ta propre splendeur.
    avec mon soutien,
    Latifa

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  6. Bonjour !!

    Merci pour ce témoignage. Merci pour toi surtout ; chaque petite pierre…
    Il est des choses que nous préférons taire. On cache, on dissimule, on range à triple tours, on enfouit, on refoule. Mais nos corps se souviennent, nos corps nous envoient des signes, nos corps savent. La vérité est souvent là. Ce secret, ou plutôt ce monstre, est enterré parce que ça semble plus facile ainsi. Quel vertige de s’en approcher. Alors on vit, engoncées dans nos corps, engoncées dans un carcan tellement étroit. Alors on ne lâche pas, surtout pas !! Que se passera-t-il si on lâche ? Angoisse.
    Et pourtant la clé est là !! Dans ce vide angoissant que l’on évite à tout prix…

    Alors que se passera-t-il quand tu lâcheras ? La libération… Ton horizon qui s’ouvrira. Tout deviendra clair. Ca fait peur ? Oui, ça nous fait toutes peur, c’est normal d’avoir peur. Quand on lâche, le soulagement est instantané. Il y a encore du chemin ensuite c’est vrai, mais il est tellement plus simple. Un chemin dont on connait la destination. Le bonheur. Et c’est vachement cool !!
    Il faut du courage et de la force pour se lâcher dans ce vide. Tu crois ne pas en avoir assez ? Pense à toute cette force et toute cette énergie que tu emploies à taire ton « ça ».
    Oui, seules c’est pas évident. Oui une psychanalyse peut aider. Parfois ce n’est pas suffisant, on résiste, on lâche pas, surtout pas !!! On approche et on se sauve.

    J’ai fait une année de psy. J’ai approché, puis fuis. Trop flippant, qu’allais-je trouver ? (qui était pourtant là, juste sous mon nez). Cela m’a aidé, gain de confiance, des ptits trucs qui se délitent. Mais pas suffisant. Tous mes progrès se faisaient en force. Toujours pas sereine, ou confiante, ou cool, peu importe. Alors j’ai fait une rencontre. Un magnétiseur. Une séance et tout a peté. « Tout » ce que j’avais oublié, « tout » ce que j’avais enfoui, ce « tout » que je ne voulais pas affronter, « tout » ce qui me pourrissait la vie. Prise de conscience, pleurs. Libération.
    Renseigne-toi, l’hypnose, le magnétisme, la psy, de nombreuses choses peuvent t’aider. Quand tu seras prête, choisis ce qui te convient :-)

    Puisse ce message t’apporter une pierre supplémentaire.

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  7. Okay, finally… here are the podcasts about the New World Order being DOA.The first one is the reearl1122091.mp3Move info and the celebration on air of the break through.1122092.mp3

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