Dans la galerie des curiosités, il n’y a pas encore eu le sexe difforme, et je me permets donc d’ouvrir la catégorie autour d’une partie du corps qui m’a tant fait souffrir, et puis maintenant, c’est moi, ma vie intime, connue de mon homme seulement, de mes gynécos officiellement aussi.
Donc j’ai eu un sexe « normal », enfin ce qu’on imagine par un sexe féminin, tout un temps.
Quand j’étais petite fille, un soir, on a abusé de moi sexuellement en justifiant cette violence par la phrase: Faut que tu t’habitues, plus tard, les hommes te feront ça.
Puis je suis allée me coucher, j’ai refoulé ce que je venais de vivre et je l’ai oublié.
Puis j’ai eu mes règles, à 11 ou 12 ans, et c’était la honte, parce que dans ma famille, on ne parlait pas de ça, et que nulle part j’avais quelqu’un pour en parler, il n’y avait pour m’aider que les pubs de tampons à la télé. Puis j’ai eu 13 ans. Et je me suis réveillée un matin, et mon sexe avait changé.
Les lèvres inférieures de la vulve était devenues du jour au lendemain énormes, elles dépassaient les lèvres extérieures de plusieurs centimètres. J’aurais du mal à dire ce que ça a bouleversé en moi. Je ne savais rien sur le sexe féminin. Personne n’en parlait avec moi. J’étais enfermée dans mon ignorance, comme un bébé complètement à la merci de ce qui lui arrive. J’étais paniquée et je crois que ça m’a détruit.
J’achetais à l’époque des magasines féminins parce que j’aimais les pubs de luxe et je me souviens que, sur une double page, il y avait une pub pour le couturier Louis Féraud, avec une femme qui portait une veste de cuir. Et le slogan, imprimé en grand, c’était: VOUS ÊTES UNE FEMME!
Moi, qui ne savais pas ce qui m’arrivait, je ne me sentais plus visée par ce slogan. J’étais, à 13 ans, persuadée d’être hermaphrodite. PERSUADÉE. C’était ma vérité! Je me souviens avoir lu des reportages sur les hermaphrodites, et je me disais: je suis ça.
À 15 ans, aussi du jour au lendemain, je me suis souvenue d’avoir été abusée. Je me suis rappelée de tous les détails. Et j’ai commencé à éprouver une énorme haine et rancune vis-à-vis de la personne qui m’avait tant abimée.
À 17 ans, j’ai craqué. Je n’en pouvais plus de ne pas pouvoir avoir de vie sexuelle comme mes copines parce que j’avais ce bout de peau en plus. Je voulais savoir, enfin savoir. J’ai pris mon courage à deux mains, et j’ai dit à ma mère que je devais aller voir un gynécologue. C’était la première fois que j’allais me retrouver sur la chaise à étriers, et je savais que j’allais exposer quelque chose d’horrible.
Le gynécologue – un type dont j’espère parvenir un jour à effacer le souvenir – m’a dit, et cela a eu l’effet d’une bombe, 1) que c’était une malformation fréquente et rien de grave, 2) que dans mon cas, c’était quand même impressionnant, 3) qu’avec une petite chirurgie plastique, quand je serai adulte, on allait réparer ça, 4) il m’a demandé si je me masturbais.
Savoir que j’étais une femme, une vraie femme, a provoqué en moi, à 17 ans, le besoin impérieux de rattraper ce que je pensais avoir raté, la baise. Je me suis mise à baiser avec n’importe qui, hommes et femme. Je me proposais sur le net, que j’étais en train de découvrir, et des hommes, venus parfois de loin, me baisaient, dans des chambres d’hôtels, des escaliers d’université, sur des bancs, dans des voitures, dans les toilettes du cinéma. Plus âgés que moi, mariés, je m’en foutais. Je suis allée loin.
Et un jour, je ne savais plus quoi faire. Alors je suis partie pour ne pas devoir solutionner tous les problèmes que je m’étais attirée. J’ai quitté le pays, je suis partie très loin, et je me suis investie à fond dans mes études. C’était mes années de sacerdoce. Je me levais à 5 h, j’étudiais, j’allais à la fac, je rentrais, j’étudiais jusqu’à 22 h, tous les jours, weekend compris. Pas de copains, pas de sorties, pas de débauche. J’ai arrêté de prendre la pilule, puisqu’elle n’était plus nécessaire. Mes règles ne sont pas revenues. Après 1 an et demi sans règles, j’ai pris des hormones pour quand même relancer la machine.
À la fin de mes études, un soir, j’ai croisé le regard d’un jeune garçon. J’ai su que je voulais l’avoir. Je l’ai dragué. On est devenu un couple après une demi-année. On s’est fiancé, on s’est marié. On a eu un enfant qu’on a perdu. On a eu un enfant qui est notre bonheur.
Je blâme ceux qui ont abusé de moi, famille et médecins. Je blâme ceux qui ne m’ont pas éduquée et qui m’ont laissée souffrir dans mon ignorance. Aujourd’hui, je commence lentement à être par-delà la haine et la colère.
Triste histoire fort bien racontée.
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Je ne connais pas votre age mais j’estime que nous devons a peu près a voir le même, je suis abasourdie… choquée… fâchée… qu’à notre époque, les choses puissent se passer ainsi….
Vos proches, votre gynéco, ces hommes, ont été d’une violence inqualifiable avec vous….
Aujourd’hui la vie vous sourit, vous êtes une résiliente, mais ce qui vous est arrivé reste inqualifiable… Impardonnable….
Je vous remercie d’avoir partagé cela avec nous.
Belle journée.
Agnès
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très émouvant.
merci de partager avec nous.
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Je suis choquée, très choquée, par la tirade de votre gynéco… J’imagine très bien ce que vous avez pu ressentir, dans votre quête de réponses. Il ne devrait pas être médecin.
Un témoignage émouvant, bravo pour l’avoir écrit… Je vous souhaite beaucoup de bonheur…
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Je suis très émue par ce témoignage. Bravo d’avoir osé. Bravo d’avoir dévoiler.
Haine à ceux qui font tant de mal, tant par la paroles que par les gestes.
Belle vie à venir.
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Je suis mortifiée par cette histoire … c’est bouleversant et c’est admirable de trouver la force de surmonter ces années difficiles pour enfin vivre une vie de femme je l’espère à présent (quasiment) épanouie et entourée d’une vraie famille aimante ! merci pour ce témoignage si émouvant ! et plein de bonheur pour la suite …
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Merci d’avoir eu le courage de nous en parler, je suis bouleversé quand je lis de tel témoignage, bouleversé par la bêtise humaine, bouleversé de se sentir si seule, bouleversé d’être qualifié d’une « malformation fréquente et rien de grave »
Enfin bravo à toi et à toi la féminité, l’amour d’un homme et d’un enfant!
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Bravo pour ton témoignage.
Moi aussi j’ai ça, moi aussi c’est venu d’un jour au lendemain à l’adolescence, mais j’imagine que chez moi ça n’a pas les mêmes proportions, en tous cas je n’ai pas la même histoire ni le même rapport à cette excroissance. Tu es la première personne que j’entends parler de ça, merci. Moi-même je n’en ai jamais parlé, aucun partenaire n’a jamais fait de réflexion, j’ai juste demandé au dernier si ça ne le gênait pas. Pas du tout, et je ne suis pas la seule à avoir ça, d’après lui. Ah ok, ça se confirme.
En tous cas je ne l’ai jamais mal vécu, je l’oublie, et à part le fait qu’il faille veiller à ouvrir ces « petites » lèvres (trop grandes) pour la pénétration, ça ne me gêne pas, au contraire c’est comme une particularité.
Tu es effectivement résiliente, bravo d’avoir su trouver un équilibre heureux après ce que tu as vécu. Bonne vie.
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Salut et merci! J’ai un peu le même problème aussi (et je l’écris pour rassurer les filles plus jeunes qui se posent des questions sur cette « anormalité »). Dans mon cas, il ne s’agit pas d’une excroissance; plutôt d’une hypertrophie (des grandes lèvres)… le résultat est à peu près le même. ça me complexe toujours un peu (pour certaines pratiques sexuelles). Mais je ne songe pas pour autant à me faire opérer. Je m’en accommode, c’est tout.
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C’est vrai que ca vient d’un coup, et ca fait vraiment un effet bizarre, moi aussi je me suis sentie » anormale » et complexée …
Puis j’ai cherché un peu sur les forums, et j’ai vu que bcp de femme ont de grandes petites lèvres…
Seulement si on va chercher du côté du porno, parce qu’on ose pas poser la question, alors on peut se sentir encore plus anormale ….
On nous dit qu’à l’adolescence les poils et les seins poussent, mais par contre les petites levres personnes n’en parle…
Alors que si ca se trouve c’est la majorité des femmes, ou une bonne partie, je ne sais pas …
En tout cas maintenant ca va, en couple depuis longtemps, et je me suis habituée….
En tout cas merci pour se témoignage, et je suis vraiment choquée de la réponse du gynéco, c’est honteux … Aïe Aïe Aïe IMBECILE FINIT !
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Je me retrouve un peu dans ce témoignage… abus, déni, souvenir qui revient brutalement… et hypertrophie des petites lèvres (asymétrique dans mon cas, puisqu’une seule des deux est hypertrophiée…).
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Beau chemin parcouru et beau travail sur soi!
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Je ne peux croire que cette « particularité » qui pourtant doit être commune, ait pu laisser aller la violence de certains à ce point…
Moi je pensais que tout le monde était comme moi, (je ne regardais jamais de porno), jusqu’à ce qu’une autre femme s’en moque… Elle, elle n’avait rien qui dépassait!
Un jour j’ai lu un truc: on devrait parler de lèvres internes et de lèvres externes. Point final.
Sur ce lien, vous verrez que nous sommes bel et bien normales…
http://s3.amazonaws.com/data.tumblr.com/tumblr_ku4z2wX9VY1qauk45o1_1280.jpg?AWSAccessKeyId=AKIAJ6IHWSU3BX3X7X3Q&Expires=1317043054&Signature=s7hAgaLk2x1Xd%2B0GTsyrQ3oZ%2FU4%3D
Bon courage et ne les écoutez pas. Si nos corps sont tels qu’ils sont, ils sont comme ils devraient être. Voilà.
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troublant temoignage …
pareil ici je suis trés complaxé par mes « petites » levres bien trop grande, a tel point qu’un jour on m’en a fait la reflexion et la personne n’a plus voulu me toucher .. j’ai pensé a la chirurgie … c tellement laid .. ca se vois dans le maillot de bain bref je deteste mon sexe
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J’aimerais bien que tu enlève tes main car l’image n’a aucun rapport avec le titre
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